Abstract

Cette étude se propose de soumettre un cas de figure très singulier, analysé ici pour la première fois. En 1966-1967, le peintre français Jean Vimenet incarne, pour Mouchette, film de Robert Bresson, l’un des rôles principaux, celui du garde-chasse Mathieu. De l’expérience éprouvante du tournage va naître, sous forme de dessins, de toiles et de pierres peintes, ce que Vimenet appellera le « portrait d’un film ». Cette série, unique dans l’histoire de la peinture moderne et contemporaine, interroge la dialectique qui se met en place entre le travail filmique de Bresson et le travail graphique et pictural de Vimenet. Au-delà, elle engage à comprendre les transmutations et les codifications esthétiques qui vont en naître. Vimenet, en « cherchant » Bresson, découvre « le monde fantastique du cinéma jamais abordé en peinture ». Sa quête le pousse à renouer avec la problématique ancienne de la représentation de la lumière diurne, modifiée par la présence de puissants projecteurs modernes. Et, focalisant son travail autour du regard, de l’œil, du plan, de la composition du cadre et du chromatisme, il en vient à exposer, picturalement, toute la mécanique bressonienne. Du troisième œil à la rhétorique cinématographique, de la force et de la forme à la lumière et aux valeurs colorées, et comme en écho à certaines remarques de Gilles Deleuze et de Jacques Aumont, les deux disciplines s’observent en chiens de faïence.

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