Abstract

Il est aujourd’hui empiriquement bien établi que la dissuasion est un outil à double tranchant. De nombreuses études montrent que, plutôt que d’empêcher la guerre, la dissuasion peut y conduire. Si les cas dans lesquels la « promesse de souffrance » conduit à un dilemme de sécurité – et ainsi finalement à l’escalade vers la guerre – apparaissent bien documentés, ceux dans lesquels la tentative de dissuader un adversaire conduirait à un dilemme de sécurité ontologique, c’est-à-dire des dilemmes identitaires fragilisant la sécurité de soi, le sont moins. Ainsi, l’exemple des crises marocaines de 1905/6 et 1911 montre que les menaces peuvent déstabiliser le sens de soi d’un acteur visé et l’amener à chercher l’escalade pour des raisons symboliques. En effet, certains acteurs voient leur image d’eux-mêmes mise en cause par une menace dissuasive dans la mesure où la contrainte équivaut à une forme de domination et de stigmatisation qui crée une forte sensation d’humiliation. Cette émotion étant une motivation particulièrement puissante, ce ne sont pas les coûts matériels qui dominent les calculs des acteurs mais les coûts émotionnels. Ceci est particulièrement valable pour les décideurs de l’État qui sont marqués par des normes et valeurs viriles. Reculer devant des menaces peut donc sembler plus coûteux pour ces acteurs que de risquer leur existence physique.

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