La réflexion développée dans ce texte se fonde sur une recherche que j’ai conduite à Bruxelles, au sujet du rapport à l’espace des femmes sans-abri, afin de comprendre comment les différentes dimensions des espaces qu’elles pratiquent participent de la construction et de la déconstruction des rapports de pouvoir à l’œuvre. Pour argumenter mon propos, j’analyse le rapport pratique et affectif à l’espace de trois femmes que j’ai rencontrées dans le cadre d’un projet d’habitat solidaire pour femmes sans-abri. En s’appuyant sur les enquêtes ethnographiques que j’ai menées entre 2017 et 2019 dans la maison où ce projet se matérialise, cet article vise d’une part, à rendre compte d’une réalité qui reste souvent cachée et, par conséquent, peu connue. D’autre part, mon objectif est d’interroger le caractère genré de catégories, telles la vulnérabilité et la solidarité, lesquelles, dans leur inefficacité à guider la formulation de propositions acceptables (par les femmes elles-mêmes), ne font que reproduire, voire aggraver les inégalités et les processus de marginalisation et d’invisibilisation existants.