Abstract

Jean-Louis Biget, Les «bons hommes » , les «bonnes dames » et leurs communautés avant 1209 Avant 1209 il existe des communautés de «bons hommes » et de «bonnes dames » dans tous les bourgs importants de la région qui s’étend du Bas-Quercy et du Toulousain au Minervois et de l’Albigeois au Sabartés. Ces communautés se règlent sur les principes de l’Évangile : pauvreté, chasteté, humilité. Elles vivent de dons, mais aussi d’un travail artisanal. Elles sont parfaitement insérées dans la vie quotidienne des villages et ne recherchent pas l’isolement, fait original. Sans se soucier des lieux, des heures ou du calendrier, les «bons hommes » prêchent en occitan et livrent un enseignement moral plutôt que dogmatique. Ainsi que les «bonnes dames » , ils appartiennent principalement aux milieux de l’aristocratie locale et des probi homines des bourgs, qui sont solidaires par leur statut social et leurs intérêts. Ils sont chez eux et vivent en symbiose avec l’ensemble de la population, qui leur témoigne un profond respect en raison de leur vie exemplaire. La religion des «bons hommes » apparaît comme l’expression d’une tradition d’autonomie religieuse localement enracinée, mais elle emprunte probablement son évangélisme aux réformateurs des XIe et XIIe siècles et semble également procéder d’une résilience socio-culturelle face aux mutations de l’époque, celles de l’Église en particulier. Par la langue, mais aussi par leur situation et leur mentalité, «bons hommes » et troubadours participent d’une même culture. «Bons hommes » et «bonnes dames » suivent leur voie religieuse propre, mais ils sont chrétiens et ne se veulent pas en rupture avec l’Église, contrairement à ce que suggèrent les sources. Il est vraisemblable que l’irruption des vaudois en Occitanie a perturbé un modus vivendi coutumier que les évêques méridionaux ne jugeaient pas répréhensible ; en tout cas, elle a généré une vive réaction des «nouveaux clercs » , pour lesquels l’existence de cellules religieuses autonomes correspondait à une hérésie. Formés dans les écoles, ces clercs ont importé en Occitanie une orthodoxie aux normes strictes, incompatible avec les formes locales du christianisme. Ils ont projeté sur ces dernières toutes les dépravations que les Pères de l’Église reprochaient aux hérétiques des premiers siècles chrétiens. Saint Dominique a mieux jugé que ses contemporains la réalité des communautés de «bons hommes » et de «bonnes dames » et il est notable qu’une part de la modernité religieuse de ces communautés a été reprise par les ordres Mendiants.

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