Abstract

Cet article commence par préciser la portée sémantique de la notion de rythme, et par dresser un bref panorama de ses occurrences dans les discours esthétiques sur le cinéma – que ces derniers émanent de réalisateurs ou de critiques/théoriciens. Cela permet de souligner la grande diversité des acceptions qu’a prise cette notion, en lien avec les contextes historico-culturels qui encadraient ses formulations respectives.Une attention particulière est portée à la contribution décisive que livre Jean Mitry, dans son ouvrage Esthétique et psychologique du cinéma (1965). Anticipant le mouvement de redécouverte du rhuthmos héraclitéen, Mitry tente de dégager le « rythme visuel » de ses analogies métriques « platoniciennes » (comme production d’équivalents visuels aux rythmes-cadences de la musique, conception particulièrement en vogue dans les années 1920, dont il souligne l’incohérence en termes ontologiques et psycho-perceptifs) pour le penser comme l’organisation, par le montage, d’un flux inscrit dans le mouvement global du monde visible à l’écran. L’enjeu pour Mitry est en fait de réfléchir à une conception du rythme cinématographique qui en ferait un « pouvoir signifiant principal », le principe primordial de l’organisation de la « vie des formes » cinématographiques.Cette conception dynamique et cosmogonique du rythme sous-tend notre approche de l’espace cinématographique, non comme un cadre stable et figé, mais comme une substance en évolution perpétuelle, un matériau intrinsèquement mobile de la composition, engageant le corps spectatoriel dans une épreuve essentielle du mouvant. Ce que nous appelons « rythme spatial du visible » n’est donc pas un équivalent pour la vue du rythme-cadence de la musique, mais un ressenti du mouvement dans la forme : un flux de contractions et de dilatations affectant les volumes de plein et de vide au sein du défilement continu des images.Ce lien intrinsèque entre le rythme et l’espace nous conduit à retrouver la « musicalité », non comme transposition pour l’œil des principes de composition musicale, mais comme puissance d’abstraction nichée au principe même du cinéma (et compatible avec la nature narrative et figurative de ses images) : une musicalité spécifique au cinéma, en somme, plutôt qu’un simple jeu de correspondances ou qu’une importation des procédés de composition de la musique au sein de ce dernier ; une musicalité qui, à rebours de toute référence picturale statique, nous invite à retourner à la source rythmique de notre expérience spatiale du monde courant.

Full Text
Paper version not known

Talk to us

Join us for a 30 min session where you can share your feedback and ask us any queries you have

Schedule a call

Disclaimer: All third-party content on this website/platform is and will remain the property of their respective owners and is provided on "as is" basis without any warranties, express or implied. Use of third-party content does not indicate any affiliation, sponsorship with or endorsement by them. Any references to third-party content is to identify the corresponding services and shall be considered fair use under The CopyrightLaw.