Improvisation and Compositional Process in Karl Naëgelen’s Fenêtre Ovale
 This paper is centred around the analysis of the creative process underlying the genesis of a recent work of music by French composer Karl Naëgelen, Fenêtre Ovale (2011), written in collaboration with two free improvisers active on the Parisian scene, Ève Risser (piano) and Joris Rühl (clarinet). This piece is remarkable in that, contrary to the vast majority of works composed in a so-called “comprovisation” framework, where the interaction between the composed and the improvised elements essentially takes place during the moments of performance, its score never actually requires any act of improvisation from its performers: the relation between improvisation and composition is thus entirely implicit, underlying the creative process itself rather than its product. 
 Using the work’s various sketches, and the numerous improvisations realized by the two musicians over the course of the composition of Fenêtre Ovale, I show that improvisation played three distinct roles in the creative process: 
 1. A role of stimulation: the improvisation enables the generation of new compositional ideas;
 2. An inspirational role: the ideas generated by improvisation are transferred, more or less directly, in the compositional setting;
 3. A role of simulation: the improvisation is used to simulate a certain musical organization and/or to validate or invalidate a given compositional choice.
 But improvisation is also embedded in the compositional project itself at a deeper level: improvisation is indeed used as a model for the composition, which seeks to emulate some of its most notable aesthetic properties. This is mainly done by importing into the score some of the specific instrumental and musical gestures used by the musicians in an improvisational setting. However, this attempt to absorb improvisational gestures into composition is not straightforward: it reveals some of the fundamental differences existing between the compositional gesture and the improviser's gestures. The paper thus concludes by discussing the intrinsic paradoxes and tensions that lie at the heart of such a project.
 
 Improvisation et processus compositionnel dans la genèse de Fenêtre Ovale de Karl Naëgelen
 Cet article s’intéresse au processus de création d’une œuvre récente de Karl Naëgelen, Fenêtre Ovale (2011), qui a été composée en relation étroite avec un duo d’improvisateurs, Ève Risser (piano) et Joris Rühl (clarinette). Cette œuvre est remarquable en ce que, contrairement à la plupart des projets musicaux mêlant composition et improvisation, la confrontation de l’improvisation et de la composition ne se joue pas dans le moment de la restitution de l’œuvre mais bien en amont de la performance, lors de la gestation et de l’élaboration même de l’œuvre.
 En m’appuyant sur les multiples esquisses de l’œuvre, accompagnées des enregistrements audio des diverses séances de travail entre le compositeur et les improvisateurs, je montre que l’improvisation a pu occuper trois fonctions essentielles tout au long du processus compositionnel: 
 1. Une fonction de stimulation: l’improvisation permet la génération de nouvelles idées compositionnelles;
 2. Une fonction d’inspiration: les matières et idées musicales apparues dans le temps de l’improvisation se trouvent remobilisées, de diverses manières, dans l’écriture de l’œuvre;
 3. Une fonction de simulation: l’improvisation vient compléter un état encore lacunaire de la partition ou fournir de toute pièce une représentation sonore d’un processus formel encore indéterminé, afin de permettre au compositeur de valider ou d’invalider un certain nombre de choix.
 Mais si l’improvisation est au cœur du processus compositionnel de Fenêtre Ovale, c’est également parce que Karl Naëgelen a cherché à capturer certaines des propriétés les plus caractéristiques de l’improvisation, et à ainsi créer l’illusion d’une musique qui s’invente dans le temps de sa performance. Cela se fait principalement en incorporant dans la partition un certain nombre de gestes instrumentaux et musicaux spécifiquement utilisés par les musiciens dans un contexte d’improvisation. Toutefois, cette absorption de l’improvisation par la composition ne va pas sans difficulté; c’est donc par l’examen des limites et paradoxes inhérents à une telle démarche que se conclut l’article, en faisant apparaître toute la tension qui peut exister entre, d’un côté, le geste du compositeur qui vise la généralité et la reproductibilité et, de l’autre, le geste de l’improvisateur toujours profondément contextuel, dynamique et idiosyncrasique.