Cet article explore la relation entre la « tragédie » de Pyrame et Thisbé mise sur scène, de manière burlesque, par les Artisans dans Le songe d’une nuit d’été et certains analogues français, dont deux particulièrement intéressants : un long poème de jeunesse par Antoine De Baïf (1572-73) reprenant le récit d’Ovide, ainsi qu’une courte pièce anonyme, basée sur l’Ovide moralisé, qui a été éditée (vers 1535) sous le titre de Moralité nouuelle, recreatifue, & profitable, a quatre personnaiges, pièce certainement destinée à la scène. Malgré quelques correspondances assez frappantes de part et d’autre avec Le songe, il ne s’agit pas de textes-sources mais plutôt d’intertextes. Le poème narratif met en relief le changement du registre culturel effectué par Shakespeare en dotant son matériau médiéval d’un appareil humaniste, avec une ornementation rhétorique élaborée. La Moralité nouuelle quant à elle nous montre sous une nouvelle lumière les efforts naïfs des comédiens amateurs chez Shakespeare de faire face aux défis théâtraux inhérents dans l’histoire ovidienne. Donc de deux points de vue très différents, les intertextes français convergent pour suggérer le potentiel parodique qui semble avoir attiré Shakespeare à cette histoire très connue afin d’insinuer, de façon novatrice et subtile, la fragilité des frontières génériques.
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