L'administration des affaires indiennes par l'état canadien a longtemps suivi une politique de tutelle coercitive visant à accomplir la transformation sociale, économique et culturelle des peuples autochtones et de leurs communautés. En se basant sur l'idée que les autochtones étaient incapables de gérer leurs propres affaires, les autorités fédérales ont imposé des bureaucraties visant à assurer le contrôle de presque tous les aspects de leur vie, de l'éducation des enfants à la gestion des ressources matérielles. Ce système de tutelle étatique a engendré de vastes et profonds mouvements de résistance chez les peuples visés. Toutefois, certains aspects des politiques de l'état fédéral n'ayant pas été uniformément rejetés par l'ensemble de la population autochtone, l'on est en droit de se demander si une acceptation passive ou même une collaboration de la part de certains autochtones aurait un effet néfaste, direct ou indirect, sur l'avancement social des Premieres Nations. En s'appuyant sur une étude de cas, cet article examine un projet unique en son genre, celui du recyclage de l'ancien pensionnat d'une réserve indienne, et met en lumière les méthodes de manipulation et d'incitation à la collaboration qui ont été employées par les autorités fédérales pour convaincre les autochtones d'abandonner le projet. L'auteur se penche également sur l'enjeu théorique et ethnographique pour l'anthropologue, et celui, politique, pour les autochtones, dans la mesure où les incitations à la collaboration peuvent être interprétées dans le cadre d'un rapport tutelle‐resistance entre les Premières Nations et l'état fédéral.The administration of Indian affairs by the Canadian state has embodied a form of coercive tutelage designed to effect the social, economic and cultural transformation of aboriginal peoples and their communities. Working from the premise that aboriginal peoples did not know what was in their own best interests, federal officials imposed bureaucratic systems that sought to regulate almost every aspect of Indians' lives, from the rearing of children to the management of material resources. This system of state tutelage in turn generated deep and widespread resistance from aboriginal communities, which frequently served to frustrate the realization of the federal government's objectives. Nevertheless, not all aspects of federal Indian administration have been uniformly resisted by all aboriginal communities or by all members of given communities. This raises the question of whether instances of non‐resistance or even of active co‐operation on the part of some aboriginal people with certain government policies, initiatives or procedures comprise acts or habits of co‐optation that directly or indirectly compromise the attainment of social justice for the greater aboriginal population. This essay employs a case study to examine the circumstances under which a unique aboriginal initiative to transform a former Indian residential school has been undermined by co‐optative state processes. The essay considers what is at stake theoretically and ethnographically for anthropologists and politically for aboriginal communities if co‐optation is operationally defined as an associated element of relations of tutelage and resistance.