Au croisement de l’anthropologie sociale et des arts du spectacle, cette thèse est consacrée à la transmission des danses mongoles en Mongolie contemporaine. En abordant l’étude de la performance dansée sous l’angle de la transmission, l’objectif principal de ce travail est de comprendre le rôle des danses dans l’engendrement d’un sentiment d’appartenance national. D’une part le bij bielgèè (bii biêlgee, biy biyelgee), danse des Oïrates (Oirat, Oirad ; Mongols de l’Ouest), inscrit au Patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO, est intimement associé, par ses évocations mimées, au mode de vie pastoral nomade. D’autre part, la « danse mongole scénique », qui en constitue la version professionnelle, donne à ces représentations stéréotypées une légitimité nationale et internationale. Mon analyse des gestes dansés, des institutions, des pratiques de transmission et de performance montre que l’efficacité des danses mongoles repose moins sur les représentations qu’elles véhiculent que sur les conditions relationnelles qu’elles mettent en place. Les apprentissages que j’ai observés, et auxquels j’ai pu participer, visent moins la formation physique des danseurs que la légitimation graduelle de ceux qui font montre d’un talent remarquable à se produire en public. Capable, par son art de la performance, de susciter des modalités de participation spécifiques chez les spectateurs, le danseur apparaît alors comme un spécialiste quasi-rituel. Délégué du groupe dont il est l’émanation légitime, il déploie ainsi dans le même acte performatif la mise en danse de la culture mongole et la légitimation de celle-ci comme un des fondements de la « mongolité ».
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