N’existe-t-il aucune limite aux formes des systèmes sociaux que les animaux peuvent produire pour s’adapter à leur environnement, ou bien des contraintes définissent-elles l’espace des possibles, restreignant les systèmes sociaux à un nombre fini de formes ? L’étude des sociétés de macaques révèle qu’elles sont constituées par un ensemble de traits covariants. Le niveau d’asymétrie des conflits, l’intensité de l’agression, la fréquence des réconciliations, le degré de permissivité de la mère, l’importance des liens de parenté ou le tempérament individuel varient de manière corrélée d’une espèce à l’autre. Le couplage des traits comportementaux à différents niveaux du génotype et du phénotype a pour effet de circonscrire les macaques à un nombre limité de styles sociaux. Ceux-ci s’ordonnent sur une échelle à quatre degrés allant d’espèces caractérisées par des relations sociales intolérantes et de strictes hiérarchies, à d’autres dont les sociétés sont plus tolérantes et les rapports de dominance moins inégaux. Les différences interspécifiques observées dans le style social des macaques ne s’expliquent pas par des variations du milieu. En revanche, l’échelle de tolérance sociale montre une forte corrélation avec la phylogenèse des macaques, ce qui révèle que le coeur du système d’interconnexions particulier à chaque espèce n’a pas été modifié depuis plusieurs centaines de milliers d’années. Ces résultats nous apprennent que les liaisons entre traits comportementaux agissent comme des contraintes qui limitent la réponse évolutive des systèmes sociaux aux pressions écologiques. Résumé