Abstract

Chora – le «cratère à mélanger» maternel, vannant et secouant de Platon – remplit «l’écart explicatif» entre les paradigmes formels «intelligibles et toujours existants» (48E5) et un monde encosmique «généré et visible». Proclus traite la gamme polysémique des termes utilisés par Platon pour chôra : hypodochê (réceptacle), kratêr (cratère à mélanger), etc., comme désignant des forces actives dans un univers où la sympathie cosmique règne, à partir des plus élevées, jusqu’aux plus basses manifestations de l’ «Un» transcendant. L’univers proclusien est un «hénothéisme», dans lequel une «unité» dominante surgit sur la totalité de l’Être et du Devenir. Chôra permet à la fois au monde immatériel et au monde matériel de recevoir, de manière appropriée à chacun, les mêmes dons transcendants que leurs homologues intellectifs‑intelligibles superieurs. Aucun niveau de la réalité n’est dépourvu de cette donation. La réceptivité (hypodochê), indéterminée, mais toujours active, est présente à tous les niveaux. L’âme reçoit l’Intellect, la temporalité reçoit le temps monadique, la matière reçoit la structure géométrique polyédrique, etc. Chôra n’est pas l’equivalent de la matière, mais permet à la matière d’être imprimée par des paradigmes formels. Dans son rôle de «cratère à mélanger», elle protège la matière de sa potentielle itérabilité et dissolution infinie. Dans l’univers proclusien, le Bien atteint la dernière et la plus extrême de ses limites, il est espace et lieu, recevant à la fois l’expansivité et une capacité à donner place à la forme pour qu’elle puisse s’imposer à la matière. Après tout, les dons lui sont accordés depuis la plus haute hypostase, celle de la Limite et de l’Illimité, premier niveau après l’Un lui‑même. Vitale pour la création, la Chôra est alors la «mère» de tout. Il n’est donc pas étonnant que, comme nous le dit Proclus, la chôra soit, en fait, la déesse Rhéa. En hommage à la littérature révélatrice antique, comme les Oracles chaldaïques, Homère et Hésiode, Proclus fournit une élucidation non seulement philosophique, mais aussi théologique, de la chôra. À la différence de Platon, il théologise la Physique.

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