Abstract
Reviewed by: Petain's Jewish Children: French Jewish Youth and the Vichy Regime, 1940-1942 by Daniel Lee Zoé Grumberg Daniel Lee Petain's Jewish Children: French Jewish Youth and the Vichy Regime, 1940-1942 Oxford, Oxford University Press, 2014, xi- 274 p. L'ambition avouée de Daniel Lee dans son premier ouvrage est de s'émanciper des grilles d'analyse dominantes dans l'histoire de Vichy et des juifs en France pendant la Seconde Guerre mondiale, à savoir la Résistance, le sauvetage et la persécution. Pour lui, si ces prismes sont opérants entre 1942 et 1944 – quand les juifs de France, étrangers comme français, sont sujets aux rafles et aux déportations dans le cadre d'une collaboration renforcée –, ils peinent à rendre compte de la diversité des expériences juives et de l'hétérogénéité de l'État français face à la question juive entre 1940 et 1942. En prenant pour objet des organisations de jeunesse créées par Vichy et dans lesquelles les juifs étaient acceptés jusqu'en 1942 – les Chantiers de la jeunesse française, l'école des cadres d'Uriage, Jeune France, les compagnons de France – ou patronnées par le gouvernement – les Éclaireurs israélites de France (Eif) intégrés aux scouts de France jusqu'en 1942 ou les Auberges de jeunesse –, son livre vise à étudier la «coopération et l'accommodation entre Vichy et les juifs» (p. 11). Son entreprise est toutefois limitée à un groupe très restreint, qu'il présente dans un premier chapitre consacré à une sociologie de la population juive de France avant 1939. Les jeunes juifs qui composaient les mouvements de jeunesse étudiés par D. Lee étaient essentiellement issus de familles présentes en France depuis au moins une génération, pour lesquelles la religion et la culture juives ne jouaient qu'un rôle mineur au quotidien et qui étaient extrêmement intégrées et acculturées à la République française. Lorsque Robert Gamzon, un israélite de dix-sept ans, fonde les Eif en 1923, il envisage un mouvement qui réconcilie l'amour de la France et du judaïsme. Si le mouvement évolue progressivement et s'éloigne du modèle du Consistoire (qui considère que la religion doit être à la base de toute organisation juive) en diversifiant son recrutement (acceptant désormais tous les jeunes [End Page 1032] juifs «y compris les sionistes et même les libres penseurs», p. 37), et s'il se rapproche des groupes sionistes comme l'Hachomer Hatzaïr et intègre quelques juifs d'Europe centrale et orientale – qui apportent un «judaïsme vivant qui était jusqu'alors inconnu des juifs français» (p. 37) –, la grande majorité de ses membres sont, à quelques exceptions près, français. D. Lee laisse donc de côté la grande masse des juifs immigrés qui, arrivés en France dans l'entre-deux-guerres, n'avaient pas obtenu leur naturalisation et n'étaient généralement pas intégrés dans les mêmes cercles de sociabilités que les juifs français. Pendant la guerre, les premiers étaient directement visés par la rhétorique antisémite vichyste et ne pouvaient espérer la moindre coopération avec un État français qui prit contre eux des mesures dès 1940. Si les contours de l'objet sont circonscrits, celui-ci ne constitue pourtant pas un cas unique. Une note de bas de page en introduction laisse ainsi penser que d'autres acteurs pourraient se prêter à ce type d'analyse, notamment les anciens combattants ou les familles des prisonniers de guerre juifs français. Le choix de D. Lee s'explique par la possibilité de faire entendre la voix des acteurs en enrichissant son étude par soixante-dix entretiens avec des témoins encore vivants dans les années 2000. L'historien s'appuie sur une manne archivistique riche. Celle-ci est composée des sources administratives classiques pour un tel objet d'étude, que sont, aux Archives nationales, les papiers du Commissariat général aux questions juives, du ministère...
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