Abstract

Au début de l’année 1914, Marie Choquas quitte la Nièvre, le pays où elle est née et a vécu toute sa vie, pour rejoindre l’Algérie. Embauchée comme nourrice pour le petit-fils du préfet d’Alger Albert Lefébure, elle y restera six années durant lesquelles elle entretiendra une correspondance avec son entourage familial et amical. Par ce geste d’écriture visant à maintenir les liens à distance et à déjouer l’itinérance que lui impose son travail, elle a documenté auprès de ces différents destinataires les six années de son émigration. Réunie et conservée dans un album de cartes postales par son fils, la correspondance de Marie Choquas constitue une opportunité singulière pour contribuer à l’étude des femmes européennes ayant migré vers l’Algérie. Elle permet de saisir le point de vue et le récit d’une femme blanche des classes populaires en position subalterne dans la hiérarchie coloniale, mais au service de ses hauts gradés, un regard rarement consigné et archivé. Aussi cette enquête offre-t-elle une approche par cas, au ras des échanges épistolaires de Marie Choquas que sont venus nourrir une série de cinq entretiens avec son petit fils en possession de sa correspondance ainsi qu’une enquête biographique approfondie sur la famille de cette nourrice, mais également sur ses employeurs dont les arrangements familiaux et l’émigration administrative jouent un rôle décisif sur sa destinée. L’objectif est alors de déployer une étude contextualisée de la trajectoire de cette nourrice entre la métropole et l’Algérie afin de saisir les ressources familiales dont elle dispose, sa situation et ses conditions de travail, mais également les caractéristiques de ses employeurs qui influent sur son parcours. Chemin faisant une attention particulière est portée sur ce qu’elle choisit d’écrire et de décrire de ces six années passées loin des siens pour comprendre comment elle donne sens et forme à son expérience migratoire et de travail ainsi qu’à son éloignement. Ainsi la correspondance de Marie Choquas en permettant de retracer une partie de son « histoire algérienne » contribue également à apprécier ce que put être le vécu des travailleuses domestiques prises dans des migrations au long cours, de plus en plus fréquentes depuis la fin du xixe siècle.

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