Abstract

L’article replace l’œuvre de M. I. Rostovtzeff sur la mer Noire septentrionale dans le contexte intellectuel et politique de la Russie pré-révolutionnaire et s’efforce de mettre en lumière les potentialités que sa synthèse offrait aux Russes en matière d’auto-identification et d’historiographie, particulièrement eurasianistes. La thèse centrale de son ouvrage sur ce sujet est mise en relation avec les interprétations religieuses qu’il donne de scènes figurées apparaissant sur des antiquités gréco-scythes (notamment le rhyton Karagodeuashkh) qui l’autorisent à relier la culture matérielle avec certains concepts politiques iraniens et à souligner des continuités historiques entre les monarchies anciennes et modernes dans le monde russe. Cette étude explique la manière dont Rostovtzeff a appréhendé l’interaction culturelle entre Iraniens et Grecs en tant que réponse russe à la tradition scientifique de J. G. Droysen et de F. Cumont qui visait à chercher les origines du christianisme dans la « fusion » entre Orient et Occident. On considère ici que Rostovtzeff avait raison de placer la collaboration et le croisement entre les élites culturelles au cœur de la formation des anciens États de la mer Noire septentrionale, mais qu’il avait tort de reconnaître là les prérequis normatifs de la civilisation en territoire russe. Ce dernier aspect de son travail était en rapport avec les intérêts impériaux d’un bout à l’autre du spectre politique et assura à Rostovtzeff une influence constante parmi les intellectuels émigrés de divers calibres et convictions.

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