Abstract
Ebenezer Howard, le père de l’idée de “cité-jardin », explique à la fin de son ouvrage Les cités-jardins de demain (Garden Cities of To-morrow 1898) que son concept n’est rien d’autre que la combinaison de trois idées préexistantes dans le domaine de la réforme agraire et urbaine. L’une de ces sources est le « plan foncier » (« Land Plan ») du radical révolutionnaire Thomas Spence (1750-1814). Après avoir caractérisé le sens social et politique du « plan » de Spence, et examiné le contenu de la « combinaison unique de propositions » qu’est en théorie la cité-jardin, le présent article s’attache à examiner comment l’emprunt de Howard à Spence s’inscrit dans un projet de réponse à la « question foncière » qui traverse les 18e et 19e siècles. La tentative de Howard est plutôt socialement conservatrice et fondée sur la collaboration des classes, la coopération inter-individuelle et le mutualisme, dans le cadre d’un capitalisme apaisé (le titre original de son ouvrage était Demain ! Une voie paisible vers la réforme jusqu’en 1902). Elle semble difficilement conciliable avec les idées révolutionnaires de Spence, dont le plan foncier se fondait sur l’expropriation des grands propriétaires terriens et l’appropriation des terres par des municipalités démocratiques fondées sur les paroisses. Une lecture attentive des deux textes, et un examen rapproché de l’usage de celui de Spence par Howard, montre qu’afin d’intégrer certains aspects du plan foncier dans son montage conceptuel, le second a pris avec la pensée du premier certaines libertés qui ressemblent à de la trahison intellectuelle.
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