Abstract

Reviewed by: Les Fleurs du Mal. La résonance de la vie by Jean-Claude Mathieu Andrea Schellino Jean-Claude Mathieu, Les Fleurs du Mal. La résonance de la vie, Paris, Corti, coll. "Les Essais," 2020, 613 pp. Professeur émérite de littérature française à l'université de Vincennes (aujourd'hui Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis), spécialiste de René Char, de Paul Éluard et de Philippe Jaccottet, Jean-Claude Mathieu reprend son flambeau baudelairien, allumé par un petit livre publié en 1972 chez Hachette (coll. "Poche critique"). Cette efficace présentation des Fleurs du Mal s'inscrivait alors dans le renouveau des études sur Baudelaire, à la veille de la publication de la nouvelle édition des œuvres du poète dans la Bibliothèque de la Pléiade. Cinquante ans plus tard, Jean-Claude Mathieu nous livre une véritable somme sur Les Fleurs du Mal, une somme personnelle, fruit d'une longue réflexion qui le conduit à prêter attention aux échos du recueil avec les classiques de la poésie française et européenne (Sainte-Beuve, Théophile Gautier, Théodore de Banville, Pierre Reverdy, Pierre Jean Jouve, Giacomo Leopardi, Giovanni Pascoli, Novalis, Friedrich Hölderlin, etc.), ainsi qu'avec les écrivains qui ont su faire "résonner sourdement la langue," comme Racine, Bossuet ou Chateaubriand. Parallèlement, Jean-Claude Mathieu tisse un [End Page 183] dialogue, continu mais discret, avec les grands lecteurs de Baudelaire, jusqu'à Yves Bonnefoy et aux exégètes contemporains. Paul Valéry avait remarqué qu'en son temps la résonance "de l'œuvre unique et très peu volumineuse de Baudelaire, emplit encore toute la sphère poétique" (11). Jean-Claude Mathieu s'approprie cette notion sensible de résonance, qu'il repère dans le tissu même de sa poésie, constamment convoquée par la critique. C'est ce "retentissement," cette forme de musique propre à sa poésie, qui lui permettent de se frayer un chemin singulier à travers ces régions lyriques: "De l'œuvre baudelairienne, remémorée à une distance telle que les figures s'estompent, demeure, pour moi, ce retentissement. Ancré dans la mémoire, d'autant qu'accourent les images qu'il lui a associées, la résonance du bois sur le pavé des cours, le fracas roulant des omnibus, l'éloignement des calèches dans la nuit" (10). L'analyse critique est ainsi attentive à la voix singulière du poète. La pensée se met à son écoute. À ce savoir sensible, réceptif à la dense matière de la langue poétique, Jean-Claude Mathieu associe une considération sur l'énergie vitale et ses profondeurs dans la poésie de Baudelaire, qui vise à "représenter symboliquement le mystère de la vie" (17–18): "Se sentir vivre," en soi et hors de soi, désir constamment réaffirmé, doit être "exprimé" par un art, qui pallie la déficience de la sensation en "multipliant" son intensité et éclaircit "l'opacité naturelle des choses" (18). Dès l'ouverture, Jean-Claude Mathieu expose les orientations de son livre. Sa méthode d'explication (et d'amplification) se veut une sorte d'échographie, sensible aux échos des poèmes des Fleurs du Mal, dont il suit avec constance la lettre avant même les interprétations. Le corpus retenu est celui des poèmes en vers: Jean-Claude Mathieu n'aborde les autres textes de Baudelaire que dans la mesure où ils peuvent éclairer Les Fleurs du Mal. Il s'adonne à l'étude de leur "poétique immanente" (14), s'intéressant aux rapports des poèmes entre eux, à la généalogie et à la formation de l'écriture poétique, de la jeunesse de Baudelaire jusqu'à sa mort. Il en résulte un détachement des lectures sociologiques, idéologiques ou politiques qui ont parfois polarisé la critique baudelairienne des dernières décennies. Le livre est divisé en dix-sept chapitres, distribués en trois parties: "Écouter les échos" (19–168), "Le poème, théâtre des résonances" (169–452), "Ne suis-je pas un faux accord?" (453–585). La première partie trace un parcours...

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