Le « Musée de poche »: collection productrice d'un patrimoine artistique

Abstract

En 1955 est créée une collection d'ouvrages en couleur et de prix abordable, qui permet à un large et jeune public d'accéder facilement à l'art contemporain, et tout particulièrement à l'art abstrait, informel. Cela n'est pas évident dans le contexte des enjeux politiques et culturels de l'après-guerre où le retour à l'esthétique classique française s'affronte au réalisme socialiste. Cette étude du « Musée de poche » (1955–1965), montre de quelle manière la collection s'inscrit parmi les écrits sur l'art, entre critique d'art et écrits poétiques, et comment elle permet au lecteur d'appréhender des œuvres abstraites. Lieu idéal de médiation et de transmission, la collection, comme stratégie éditoriale, contribue à transformer ces nouvelles créations esthétiques en patrimoine culturel national. À travers une analyse discursive de dix ouvrages de la collection, trois procédés qui ont contribué à la promotion de l'art abstrait sont mis en lumière: la légitimité du discours de l'auteur, qu'il soit critique d'art, poète, écrivain ou journaliste; la représentation de l'artiste en question, dont le parcours semé d'épreuves est à la fois stéréotypé et singularisé, mais surtout valorisé; et enfin une série d'analogies entre l'art abstrait et la nature ou de comparaisons avec la musique, ou bien encore d'expressions métaphoriques manifestant la « collapse de temps » où l'universalité de l'art abstrait s'inscrit dans le passé, le présent et l'avenir.