Abstract

Reviewed by: Frères sorcières: entrevoûtes by Antoine Volodine Patrick H Moneyang Volodine, Antoine. Frères sorcières: entrevoûtes. Seuil, 2019. ISBN 978-2-02-136375-3. Pp. 304. Enfant orpheline, Éliane Schubert est adoptée par une femme appartenant à une troupe de théâtre itinérante. Cette femme qu'elle considèrera comme sa mère va la former au mystère théâtral, et surtout au chamanisme, en lui transmettant des phrases, des slogans et des incantations étranges n'appartenant pas au répertoire normal du théâtre (91). Des années plus tard, après la mort de sa mère, Éliane rejoint une autre troupe ambulante qui a, elle aussi, une vision chamanique du théâtre. Malheureusement, sa nouvelle troupe est attaquée et tous les membres massacrés par une bande de bandits. Seule survivante, Éliane est faite captive. C'est alors qu'elle intègre progressivement le groupe de bandits. Elle se rapproche de Yee Mietiva, une femme pratiquant le chamanisme et ayant la réputation d'être sorcière. De ce rapprochement naît une "complicité sorcière" (89) due à leur commune passion pour les déclamations magiques. Ensemble, les deux "sorcières" se livreront à des rituels surnaturels qui bien souvent ne répondront pas aux attentes miraculeuses escomptées. Ainsi, ce roman se divisant en trois parties pourrait se lire comme une écriture de la "vocifération". C'est elle qui structure le récit et y est présentée comme mystérieuse, magique, ensorcelante et puissante. Le décor est planté avec l'histoire d'Éliane dans la première partie intitulée: "Faire théâtre ou mourir". Sous forme d'un interrogatoire auquel répond l'héroïne, la voix narrative retrace l'aventure tragique de la jeune femme de manière à mettre en exergue son initiation aux "vociférations étranges" et leur degré d'influence dans sa vie. L'interrogateur ne manque pas de faire quelques observations critiques en soulevant notamment la question de leur efficacité magique, préoccupation à laquelle l'héroïne réplique: "Je n'étais pas loin de croire […] mais en même temps, je n'y croyais pas" (91). Cette réponse est compromise par le pouvoir magique de "vociférations" que le lecteur découvre par la suite. Celles-ci sont d'abord présentées dans la deuxième partie consistant en une liste de 343 préceptes magiques d'Éliane Schubert. Le style est violent, impersonnel, concis et les préceptes sont énoncés sous un mode impératif. Tel qu'annoncé au départ par la voix narrative, ces vociférations sont des véritables "appels au meurtre […] des phrases terriblement brutales et concises, qui sonnaient comme des avertissements, des conseils incompréhensibles et des slogans" (11). La violence et surtout la force magique de ces vociférations sont au plus haut point manifestes dans la troisième partie intitulée: "Dura nox, sed nox". Cette magie est d'abord celle d'une stratégie narrative que le lecteur non averti pourrait trouver déconcertante: une phrase s'étalant sur 120 pages et dépourvue de points. Elle [End Page 218] l'est ensuite par le monde parallèle mis en scène. Des personnages—parfois hommes et femmes en même temps—se transforment, s'incarnent, se réincarnent, disparaissent et reviennent interminablement à la vie. Pour mieux apprécier le texte, on recommandera au nouveau lecteur d'Antoine Volodine de consulter le rapport de l'auteur au post-exotisme. Patrick H Moneyang Pacific Lutheran University (WA) Copyright © 2020 American Association of Teachers of French

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