Abstract

L’approche en termes de critères et d’indicateurs a été proposée en 1992 par le Canada comme une démonstration opérationnelle de la capacité intégratrice du terme de gestion durable, que les négociateurs forestiers de la CNUED (Rio de Janeiro, 1992) mettaient en avant pour contrer les ambiguïtés du concept de développement durable appliqué à la forêt. La mise en oeuvre de la résolution H1 (consacrée à la gestion durable) de la seconde conférence ministérielle pour la protection des forêts en Europe (Helsinki, 1993) a été le champ d’expérimentation de cette approche au niveau du continent européen. La liste des critères et indicateurs adoptés par le processus d’Helsinki est un compromis piloté par des forestiers d’État et des scientifiques, reflétant un consensus à l’échelle du continent européen, à un moment donné. Cette approche a inspiré d’autres processus intergouvernementaux régionaux, associant à chaque fois des pays qui avaient la conviction de partager à la fois les mêmes problèmes au regard de la gestion durable des forêts, mais aussi la même culture pour les résoudre, les critères et indicateurs n’ayant pas une valeur en soi, mais pour l’action et dans un contexte sociétal particulier. Les forestiers européens ont affiché dès 1995 un fort scepticisme sur la possibilité de critères et indicateurs de gestion durable transcontinentaux, à plus forte raison mondiaux. Les critères et indicateurs de gestion durable ne traduisent en effet pas une approche objective et désincarnée de ce que sont « la gestion, la conservation et l’exploitation durables de tous les types de forêts ». Ils expriment plutôt la volonté politique des forestiers de sortir d’une revendication d’être seuls légitimes et compétents pour parler des forêts, afin de s’engager, plus ou moins laborieusement, dans la direction d’une « vision partagée » avec d’autres parties prenantes, au moins dans un dialogue, sans sélectionner a priori ses partenaires. Cette dimension d’outil d’une gouvernance rénovée des politiques forestières était à l’origine aussi forte que l’ambition de faire de ces critères et indicateurs des outils de pilotage pour les décideurs forestiers. Mais leur postérité a dépassé ce qu’imaginaient leurs promoteurs, bien que la démonstration de leur opérationnalité et de leurs bénéfices n’aient pas encore été solidement établie.

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