Thierry Michot est Professeur des Universités et a été de 2019 à 2021 directeur du Laboratoire d’Études et de Recherche en Sociologie (LABERS) à l’Université de Brest. De par son parcours universitaire en tant que chercheur, porteur de projet de recherche et directeur de thèse, il détient une expérience significative dans la gestion de recherches collectives, notamment interdisciplinaires et mobilisant des méthodologies mixtes. L’interview a été organisée par Servane Le Clinche et Patrick Bouchet en visioconférence à l’issue du colloque « Collectifs de recherche et recherches collectives en Management du sport » de la Société Savante en Management du Sport à Corte.

Les recherches sur les courses à pied d’ultra-endurance se multiplient, et témoignent de la popularité de ce sport. Quelles places occupent les sciences humaines et sociales dans la compréhension de cette pratique ? Cet article contribue à préciser la compréhension d’un véritable phénomène de société à partir d’une revue de littérature pluridisciplinaire dans le domaine des sciences humaines et sociales sur l’ultra-trail. Une analyse qualitative systémique de leur contenu permet d’identifier trois thèmes majeurs : 1) Engagement et profils des coureurs d’ultra-trail ; 2) Motivations et expériences de ses participants ; 3) Territoires et événements du trail running. Ces résultats ont permis de synthétiser les travaux réalisés à ce jour et constituent un point de départ pour développer d’autres approches. Il apparaît qu’au-delà des ancrages disciplinaires, les résultats présentés résonnent entre eux autant qu’ils mettent en évidence un certain nombre de paradoxes, ce qui est représentatif de la discipline elle-même. Au vu de ces observations, certaines pistes peuvent être explorées pour approfondir ces approches et ces études.

En France, 83 % du parc d’équipements sportifs appartient aux collectivités territoriales qui doivent en financer le renouvellement et l’adaptation à de nouvelles pratiques ludiques et hygiéniques, dans un contexte de contrainte budgétaire croissante. En conséquence, les acteurs publics ont développé des collaborations avec le secteur privé qui ont récemment pris la forme de contrat de concession, permettant de déléguer à un groupement d’entreprises privées une mission globale sur un projet d’équipement (financement, conception, construction et exploitation-maintenance). Cette nouvelle forme de contractualisation a pour conséquence de redéfinir le positionnement et les stratégies des parties prenantes au sein des projets d’équipements sportifs. L’objectif de nos travaux est alors d’étudier ces nouvelles modalités de collaboration public-privé dans le cadre de projets de concession de centres aquatiques. Face à la complexité du phénomène organisationnel étudié, une approche abductive a été mobilisée. Cette contribution vise à démontrer l’intérêt de recourir à cette méthode et à illustrer la démarche dans le cas des relations public-privé au sein des projets d’équipements sportifs. Elle propose ainsi un retour d’expérience et montre toute la pertinence de cette approche pour analyser des phénomènes complexes résultant du caractère hybride des organisations étudiées en management du sport.

La création de Structures Dédiées à l’Engagement Social (SDES) telles que les fondations et/ou les fonds de dotation par les clubs professionnels français pour développer leur stratégie sociétale est une pratique en voie d’institutionnalisation. Ce phénomène questionne le(s) rôle(s) de ces SDES, raison pour laquelle nous mobilisons le concept de logiques institutionnelles (LI), emprunté à la théorie néo-institutionnelle, afin de montrer comment l’engagement social se reconfigure dans le secteur. Un design de recherche original scindé en trois études séquentielles et encastrées a été imaginé, reposant une approche multi-méthodes et multi-niveaux. La première caractérise le processus d’hybridation du secteur à travers quatre critères (gouvernance, actions, ressources et évaluation). Cette étape constitue le point de départ de la deuxième étude, laquelle montre l’émergence d’un nouveau modèle d’engagement social dans le secteur. Dans une démarche programmatique, nous décrivons la troisième et dernière étape visant à identifier les LI parcourant les SDES des clubs au travers d’études de cas. Enfin, nous discutons des apports méthodologiques de cet article et de ses limites, qui invitent à envisager des perspectives de recherche pour capturer avec plus de finesse les logiques en matière d’engagement social au sein du sport professionnel français.

Cet article s’appuie sur un travail doctoral en sciences et techniques des activités physiques et sportives (STAPS), portant sur l’articulation entre les politiques sportives locales et les stratégies des fédérations sportives. Il questionne les leviers d’observation d’un objet singulier – l’action publique sportive – dans des conditions spécifiques : la réalisation d’une thèse financée par un contrat doctoral universitaire. La contribution présente certaines techniques d’enquête mobilisées pour contourner les difficultés d’accès aux organisations politiques et sportives (animation de conférences, participation à des commissions, diffusion de la recherche dans des espaces professionnels, etc.). Elle revient en partie sur la conception d’une innovation méthodologique intitulée « stage doctoral », qui a permis au doctorant de se positionner en immersion au sein d’une collectivité locale. L’article discute ces différents positionnements en démontrant que le statut de doctorant contractuel peut, lorsqu’il est mobilisé stratégiquement par le chercheur, générer des opportunités méthodologiques pour observer l’action publique sportive en train de se faire.

La programmation d’espaces d’activités physiques et sportives extérieurs semble en constante évolution en France. Skate-parks, city-stades, streetworkout , aires de fitness, terrains multisports, parcours de santé sont autant d’équipements diversifiés pour inciter la population à la pratique d’activités physiques et/ou sportives. Entre 2018 et 2020, l’État (via le CNDS puis l’Agence nationale du Sport) a financé 467 équipements sportifs de proximité pour un montant de 19,9 millions d’euros. La majorité des projets financés ont été des plateaux multisports (72 %). Plus récemment, le plan 5000 terrains de sport a pour vocation d’accompagner cette dynamique. Pour éclairer ce sujet, il convient de structurer une démarche analytique de recherche. Dans cette dernière, nous allons tenter d’identifier les usages particuliers des espaces d’activité physique et/ou sportive en accès libre dans la métropole lilloise (modalités d’accès, fréquentation, durée et types de pratique, caractéristiques des usagers, motivations de pratique) afin d’identifier le(s) rôle (s) qu’ils jouent aujourd’hui dans le renouvellement des formes d’expression de l’urbanité (Augustin, 1999). L’observation des pratiques ainsi que l’écoute des besoins jouent un rôle fondamental lorsqu’il s’agit de diagnostiquer, de programmer, de concevoir ou d’évaluer des espaces publics. Dans le cadre de notre étude, nous avons procédé à des observations in situ de type ethnographique, administré des questionnaires et réalisé des entretiens semi-directifs avec des élus ou des techniciens en charge de la mise en œuvre de ces installations. Une démarche plus qualitative permet également d’identifier auprès des opérateurs de l’offre (état, collectivités, secteur privé), les objectifs assignés à ces projets, les principales contraintes et les nouvelles tendances de cette dynamique de l’offre.

L’objet de cet article est de s’intéresser à la pluralité des représentations associées au « professionnalisme » chez les athlètes d’élite ainsi qu’à la diversité des parcours et des configurations qui y mènent. En mobilisant la polysémie de ce terme, tant dans le langage indigène que dans le vocabulaire sociologique, il s’agit d’éclairer sous un jour nouveau la construction des carrières sportives de haut niveau. Pour ce faire, nous nous appuyons sur une enquête qualitative par entretiens semi-directifs réalisée auprès de 30 athlètes appartenant à l’élite athlétique française contemporaine ( a minima sélectionnés à plusieurs reprises en compétition internationale). Prenant pour terrain d’enquête une activité sportive dont la pratique à haut niveau repose sur un marché international profondément inégal qui permet à certains d’en vivre, parfois très confortablement, tout en générant pour d’autres précarité et instabilité, nous montrons que la façon dont les athlètes se définissent (ou pas) comme « professionnels » doit être pensée en fonction de leur position objective dans la carrière sportive et du rapport subjectif qu’ils entretiennent avec cette dernière. Nous analysons ensuite les ressorts de leurs professionnalisations en étudiant la manière dont des configurations jouent comme ressources ou contraintes en fonction des agencements entre facteurs individuels, dispositionnels et institutionnels.