ObjectifIl existe des données selon lesquelles la dérégulation du débit sanguin oculaire chez des sujets qui présentent un trouble vasospastique découlerait de stimuli biomécaniques, d'où une sensibilité de la tête du nerf optique en présence de glaucome. Nous nous penchons ici sur le rôle du trouble vasospastique dans l'association entre la rigidité oculaire et les lésions neurorétiniennes, en posant comme hypothèse qu'il existe une corrélation entre une faible rigidité oculaire et l'apparition de lésions glaucomateuses plus importantes chez les patients qui présentent un trouble vasospastique. NatureÉtude transversale. ParticipantsPatients qui présentent un glaucome à angle ouvert (GAO), dont le disque optique a une allure suspecte ou qui n'ont pas de glaucome. MéthodesLa rigidité oculaire a été mesurée au moyen d'une méthode non invasive mise au point et validée par notre équipe. On a eu recours à la tomographie par cohérence optique en domaine spectral pour mesurer l’épaisseur des couches de fibres nerveuses rétiniennes (RNFL, pour retinal nerve fiber layer) et du complexe des cellules ganglionnaires. Le trouble vasospastique a été évalué grâce à un questionnaire standardisé créé à partir de questionnaires validés et adapté aux besoins de notre étude. L'athérosclérose a été évaluée d'après le score de maladie cardiovasculaire de Broadway et Drance (1998). On a recherché des corrélations entre la rigidité oculaire et les paramètres structuraux chez des patients présentant un trouble vasospastique de même que chez des patients présentant une athérosclérose. RésultatsSur les 118 patients – qui avaient un GAO (n = 67), dont le disque optique avait une allure suspecte (n = 26) ou qui ne présentaient pas de glaucome (n = 25) – recrutés de manière consécutive, 10 ont reçu un diagnostic de trouble vasospastique, et 37, d'athérosclérose. Dans le groupe trouble vasospastique, il a été possible d’établir des corrélations significatives entre la rigidité oculaire et le complexe des cellules ganglionnaires le plus mince (rs = 0,681; p = 0,030), l’épaisseur moyenne des RNFL (rs = 0,745; p = 0,013) et l’épaisseur des RNFL dans le quadrant temporal (rs = 0,772; p = 0,009), ce qui dénote un dommage accru à mesure que diminue la rigidité oculaire. Les tendances se sont maintenues, même après avoir réalisé une correction de tests multiples. Cependant, seule la huitième heure de l'horloge des RNFL correspondant au quadrant temporal inférieur de la région péripapillaire demeurait significativement corrélée avec la rigidité oculaire dans le groupe trouble vasospastique (p = 0,015). En revanche, aucune corrélation n'a pu être mise au jour dans le groupe athérosclérose (p > 0,05). ConclusionsLes résultats de la présente étude pilote révèlent une tendance selon laquelle les patients qui présentent un trouble vasospastique et dont la rigidité oculaire est moindre sont sujets à plus de lésions des structures neuronales. Il est donc possible que la rigidité oculaire joue un plus grand rôle dans le glaucome chez les patients qui présentent un trouble vasospastique que chez les patients qui présentent une athérosclérose. Si ces résultats jettent une lumière intéressante sur la physiopathologie du GAO, d'autres études devront étayer nos observations.