Ruptures, réconciliation, décolonisation et responsabilité : musique autochtone et composition dominante
La domination est le plus souvent comprise du point de vue du dominant plutôt que de celui du dominé . Le système occidental eurocentrique et sa narratocratie, à partir desquels la composition contemporaine a évolué, nécessitent un changement significatif. Ce basculement vers la décolonisation est essentiel si l’on veut favoriser une vision du monde plus inclusive et transformer la narratocratie existante. La transformation des institutions exige un virage profond vers la décolonisation et l’indigénisation. Cette réorientation, soutenue par une nouvelle vision du monde, est cruciale dans la promotion de l’inclusivité et l’opposition de la narratocratie actuelle. Les pratiques artistiques, y compris les compositions contemporaines, sont enracinées dans les traditions et normes du passé. Cela peut se justifier en ce qui concerne les méthodes et pratiques, mais ne peut s’appliquer aux traditions socioculturelles et aux préoccupations actuelles visant à contrer les biais culturels dominants, comme la décolonisation. Le Conseil consultatif autochtone (CAA) du Centre de musique canadienne est une organisation qui cherche à réconcilier les oeuvres ignorant les protocoles autochtones et portant préjudice aux peuples par des représentations erronées. Par ces actions, le CAA vise à offrir des perspectives sur des méthodes décolonisées pour engager les cultures autochtones de manière respectueuse et réciproque. Les traditions musicales occidentales, fondées sur l’exploitation des chants populaires pour l’expression créative, ont permis à des compositeurs tels que Léo-Pol Morin, John Jacob Weinzweig, et Edward MacDowell, entre autres, de s’approprier et d’utiliser des chants autochtones sans se soucier des effets sur les peuples autochtones et leur culture. Les enregistrements ethnographiques et l’absence de collaboration avec les autochtones lorsqu’il est question de leur culture et leur musique illustrent ces pratiques extractives historiques. Ces méthodes persistent encore aujourd’hui, augmentant un catalogue de compositions basées sur des thèmes autochtones qui continuent de causer du tort aux peuples autochtones. En tant que compositeurs, nous pouvons représenter le changement par des actions menées indépendamment des institutions. Accepter les points de vue exprimés par les peuples autochtones dans la société contemporaine offre un moyen de renoncer au contrôle systémique sur l’expression artistique en musique. Les moyens d’y parvenir reposent largement sur l’adoption de méthodologies cycliques basées sur les modes de connaissance et de pratique autochtones. L’inspiration ne doit plus être tirée de la musique autochtone elle-même, mais d’une compréhension de la coexistence et de l’harmonie avec les peuples autochtones.
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- 10.5749/j.ctvzpv6bb
- May 12, 2020
410
- 10.2307/2708933
- Apr 1, 1975
- Journal of the History of Ideas
1
- 10.1515/9780773587120-010
- Feb 24, 2012
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- 10.3138/9781487578008-013
- Dec 31, 1995
5
- 10.2307/3051911
- Jan 1, 1989
- American Music
8
- 10.1017/s1355771808000186
- Jun 25, 2008
- Organised Sound
1
- 10.1007/978-3-662-68526-6_203
- Jan 1, 2024
- Research Article
1
- 10.3406/austr.1978.1882
- Jan 1, 1978
- Austriaca
La thématique de la régression chez Thomas Bernhard. Aucune méthode, qu'elle soit vieille ou dans le vent, ne donne la clé magique qui permet de comprendre une oeuvre artistique. Cependant, notre manière d'approcher Thomas Bernhard s’inspire de Jean-Paul Weber pour qui la «thématique» d’un auteur représente le thème fondamental qui, partant en général d'une trace qu'un souvenir d’enfance a laissée dans la mémoire d'un écrivain, traverse, mutatis mutandis, toute sa production littéraire, sous une forme symbolique, par modulation, orchestration ou transposition. Thomas Bernhard lui-même vient à l'appui de cette thèse : dans sa pièce Die Berühmten, il affirme que chaque grand artiste ne crée toujours qu'une seule œuvre qu'il varie sans cesse et imperceptiblement. Le mot de «régression» est, depuis Freud, chargé d'un sens psychanalytique et signifie le retour du libido à des événements vécus pendant l’enfance et même le retour de la sexualité à un stade infantile. Nous comprenons le mot «régression» dans un sens beaucoup plus large qui se trouve déjà in nuce dans les écrits de Freud : il exprime une diminution, un dépérissement, une mutilation, voire une auto-mutilation ; plus qu’une attitude tragique, il faut y voir une attitude profondément ironique à l’égard de soi-même et à l'égard du monde. Il nous a semblé que la thématique de la régression chez Bernhard se rapporte plus à l'individu qu'à la société, ce qui n'exclut nullement une critique sociale, sensible, d'une façon latente, dans son œuvre entière. Notre étude s'en tient aux pièces de théâtre de Thomas Bernhard : pour ne pas dépasser les limites d'un article, il fallait faire un choix. La thématique de la régression chez Bernhard se situe essentiellement sur trois niveaux : la déchéance physique et/ou psychique des personnages, le statisme de l’action, et la défaillance de la langue en tant que moyen de communication. En partant des Aveugles (1891) de Maurice Maeterlinck et de Melusine (1895) de Peladan, nous essayons de situer Thomas Bernhard dans une filière de tradition littéraire, puis de dégager son originalité, en analysant ses pièces, de Ein Fest für Boris à Immanuel Kant. Des parallèles s'établissent avec Büchner puis avec Beckett. La mutilation physique et/ou psychique peut être à la fois une tare et une distinction. Qu'elle soit l'une ou l'autre, elle est évidemment signe d'une destruction, parfois d'une destruction volontaire, parfois de cette destruction qui est inhérente à chaque vie individuelle autant qu'à la vie elle-même. En ce qui concerne la régression sur le niveau de l’action, Maeterlinck, avec ses «drames statiques», se révèle, une fois de plus, le prédécesseur de Bernhard, comme d'un certain théâtre absurde d'ailleurs. Quant à la régression dans la langue, elle s'annonce déjà avec Tchékhov (Les trois sœurs) et se cristallise, sur le plan théorique et pratique, chez A. Artaud pour qui Thomas Bernhard a manifesté un intérêt bien connu. Les drames de Bernhard sont des paraboles, des paraboles d'une situation ou d'une pensée qui se dégrade. Important est le rôle du masque, non pas en tant que moyen de préfigurer une personnalité encore mal dessinée, comme dans l'Antiquité, mais en tant que moyen de dévoiler les vrais traits d’une personnalité : le choix de faire porter par des humains des masques d’animaux nous a paru, bien sûr, particulièrement significatif à cet égard. La thématique de la régression est, d'une manière évidente, liée à la thématique de la maladie et de la mort. Comme celle-ci détermine toute l'œuvre de Bernhard, ce dernier a été, on le sait, qualifié une fois pour toutes, semble-t-il, d'auteur pessimiste. En contrepartie, nous essayons de montrer l'importance du jeu chez Bernhard. Ses personnages aiment le jeu, lui-même affirme mener constamment une existence double dont un aspect est une «existence jouée», écrire enfin peut être un jeu, un jeu avec la vérité et la fiction, un jeu sur le sentier étroit entre deux abîmes, mais un jeu qui, en fin de compte, se révèle peut-être la seule issue.
- Research Article
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- 10.1353/ces.2012.0005
- Jan 1, 2012
- Canadian Ethnic Studies
This paper is based on twenty-three interviews conducted with Indigenous faculty at ten universities in Canada. Only .9% of total university faculty are Indigenous. While Indigenous faculty shared some concerns with racialized faculty such as under-representation, the lack of diversity among senior administration, and the policies around tenure and promotion decisions, most of their apprehensions were unique to their Indigenous heritage and cultural lifestyle. In the first instance, their few numbers are highly concentrated in certain disciplines—the so-called helping disciplines such as social work, education and law. Most of their studies are taught in programs as there are very few departments. Issues such as who should teach Indigenous studies; the design of Indigenous curriculum and whether Indigenous studies should be mainstreamed or “ghettoized” in separate areas of the university were highlighted. They also feared the loss of personal identity as an Indigenous people. A critical concern for Indigenous faculty is that their research is primarily within their own communities and, as such, is not valued or legitimated for tenure and promotion purposes. Some also expressed the view that their entire discipline—Indigenous studies—was not considered a true university discipline. Cet article s’appuie sur 33 entrevues menées auprès de professeurs autochtones dans dix universités canadiennes. Ces derniers ne font que 9% de l’ensemble du corps professoral universitaire. Bien qu’ils aient certains problèmes en commun avec leurs collègues des minorités visibles, comme ceux de la sous-représentation, le manque de diversité dans la haute administration et les politiques portant sur la titularisation et les promotions, ils s’inquiètent quant à eux beaucoup plus de leur héritage indigènes et leur mode de vie culturel. Avant tout, leur petit nombre est fortement concentré dans certaines disciplines – dites «de service au public», comme le travail social, l’éducation et la loi. Vu le peu de départements d’Études autochtones, celles-ci sont pour la plupart seulement enseignées dans des programmes. Elles sont aussi l’objet d’autres questions dont : qui devrait les enseigner, la détermination du curriculum et si on devrait les intégrer à l’ensemble des autres cours ou les «ghettoïser» dans des zones séparées de l’université. Ils craignent aussi la perte de leur identité en tant que peuples indigènes. L’inquiétude essentielle du corps professoral autochtone vient de ce que leurs recherches ont avant tout lieu au sein de leur propre communauté et qu’en tant que telles, elles ne reçoivent ni validation, ni légitimation pour obtenir une titularisation et des promotions. Quelques uns de ses membres ont aussi exprimé leur opinion que le domaine dans son entier – à savoir les études autochtones – n’est pas considéré comme une véri-table discipline universitaire.
- Research Article
- 10.13162/hro-ors.v12i1.5879
- Apr 24, 2025
- Health Reform Observer – Observatoire des Réformes de Santé
In light of increasing rates of sexually transmitted and blood-borne infections (STBBIs) in Canada, as a group comprised primarily of frontline healthcare workers, we undertook a healthcare practice reform in Ontario to establish the first nurse-led asynchronous online STBBI testing platform, known as GetaKit.ca. The website offered clinically indicated testing for STBBIs based on public health guidelines and resources for preventative health services. Services operated in collaboration with public health units, who acted as local ordering providers for STBBI testing and facilitated linkage to care services for persons with positive test results or who required additional health follow-up. Results from the first 12 months of operating GetaKit.ca showed high uptake of this service, with 3,497 orders for STBBI testing from eligible persons, of whom 59% belonged to an equity denied group. A total of 83 new diagnoses (positivity rate of 2.4%) were identified in persons who completed testing via GetaKit.ca, all of whom were linked to treatment and care through their respective health units. We interpret these findings to suggest that our reform was able to expand access to persons with undiagnosed STBBIs. En tant que groupe composé principalement de travailleurs de santé de première ligne confronté à la persistance et à l'augmentation des taux d'infections transmises sexuellement et par le sang (ITSS) au Canada, nous avons entrepris une réforme des pratiques de soins de santé en Ontario afin d'établir la première plateforme asynchrone de dépistage des ITSS en ligne dirigée par des infirmières, connue sous le nom de GetaKit.ca. Le site propose des tests de dépistage des ITSS cliniquement indiqués, basés sur les directives de santé publique, ainsi que des ressources pour les services de santé préventifs. Les services fonctionnent en collaboration avec les agences de santé publique, qui agissent en tant que prestataires locaux et facilitent le lien avec les services de soins pour les personnes dont les résultats de test sont positifs ou qui ont besoin d'un suivi médical supplémentaire. Les résultats des 12 premiers mois de fonctionnement de GetaKit.ca ont montré un taux élevé d'utilisation de ce service, avec 3 497 commandes de tests de dépistage des ITSS pour des personnes éligibles, dont 59 % appartenaient à un groupe défavorisé sur le plan de l'équité. Au total, 83 nouveaux diagnostics (taux de positivité de 2,4 %) ont été identifiés chez les personnes ayant effectué un test via GetaKit.ca, qui se sont toutes vues prescrire un traitement et des soins par l'intermédiaire de leurs unités de santé respectives. Nous interprétons ces résultats comme suggérant que notre réforme a été en mesure d'élargir l'accès aux personnes souffrant d'ITSS non diagnostiquées.
- Research Article
- 10.61850/allj.v5i1.680
- Dec 25, 1981
- AL-Lisaniyyat
Dans la mesure où ce qui unit (à savoir l’implicite épistémologique) les méthodes actuelles d’enseignement des langues lui semble plus impor- tant que ce qui lés distingue (à savoir la variété des supports technologi- ques), l’auteur propose une analyse globale des méthodes directes. Plus précisément, l’auteur veut montrer qu'une méthodologie qui tend à négli- ger l’acquisition de la grammaire tend, du même coup, à borner l’apprentis- sage à un seul psittacisme.
- Research Article
- 10.29147/datjournal.v9i3.899
- Nov 21, 2024
- DAT Journal
À partir de l’œuvre de Tracey Emin I’ve got it all, je réfléchis dans cet article à notre perplexité face au rapport complexe entre désir et capital. Ce qui nous rend perplexes, c’est que le capital puisse nous imposer ses valeurs et gouverner nos désirs de manière si incontournable, malgré la conscience que nous avons de ses effets nocifs. Pour développer cette problématique, je m’appuie sur l’ontologie de la puissance de Spinoza. Je m’efforce de comprendre, d’une part, la relation entre désir et création de valeur et, d’autre part, la perplexité en tant que mode spécifique de l’imagination et de l’affectivité. L’image de l’argent semble y jouer un rôle crucial, plus important même que celui de l’image du sexe. L’argent, par l’effectivité de sa médialité absolue, tend à devenir l’objet suprême de nos désirs. Face à cela, notre perplexité n’est pas un indice d’impuissance ; au contraire, elle indique la puissance de notre imagination. Tant que nous ne retombons pas dans la consternation, l’enthousiasme ou l’indifférence, nous ne sommes pas complètement assu- jettis au capital.
- Research Article
- 10.62410/ppa3a286
- Dec 13, 2024
- Musiques: Recherches interdisciplinaires
Cet essai fournit un récit détaillé de la réception du compositeur, ethnomusicologue et pianiste hongrois Béla Bartók (1881-1945) en Italie à travers l’analyse de la presse périodique, des concerts publics et radiodiffusés, et des correspondances privés. La réception italienne de Bartók au 20e siècle est utilisée comme cas d’étude privilégié pour comprendre la genèse et la diffusion du mythe de Bartók en tant que héros antifasciste. L’essai mentionne également, dans une perspective comparative, la réception de Bartók en France. Appréciée en Italie dès les années 1910, la musique de Bartók connut un succès considérable sous le régime de Mussolini malgré l’hostilité du compositeur à la violence fasciste. Bartók fut ensuite associé à la résistance culturelle antinazie au début des années 1940 et devint finalement un martyr de la liberté au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. La « vague bartókienne » qui s’affirma enfin en Italie pendant la guerre froide fut le résultat de la fusion entre le mythe de Bartók en tant que « musicien de la liberté » – une définition forgée en 1947 par le musicologue antifasciste Massimo Mila – et le mythe de la renaissance nationale. Une fusion qui avait ses origines dans le paysage sonore de la dictature fasciste et de la Resistenza. Tout en fournissant au lectorat francophone les points de repère essentiels sur la réception italienne du musicien hongrois, l’essai fait aussi le point sur le « mythe de Bartók ». Cette question a suscité un débat au sein de la musicologie contemporaine et peut avoir des conséquences pour réévaluer la réception internationale du compositeur.
- Research Article
- 10.14428/regardseco2010.05.01
- Oct 12, 2018
- Regards économiques
A la fin du mois de mars 2010, Michel Daerden, Ministre des Pensions au gouvernement fédéral, présentait son livre vert sur les pensions. Selon un communiqué de presse de Belga (25/03/2010), lors de cette présentation, «Michel Daerden a invoqué notamment les bonus pension pour inciter les gens à travailler plus longtemps. Ce système existe déjà et certains disent qu'il a échoué. Le ministre estime quant à lui qu'on manque de données statistiques précises pour juger de son impact».
 Regards économiques a saisi la balle du Ministre au bond pour publier, dans sa dernière livraison, les résultats d’une étude de Marjan Maes qui démontrent, sur base d’une analyse statistique objective et rigoureuse, que le «bonus de pension» est une réforme inefficace en matière de soutenabilité financière, et relativement peu efficace en termes de relèvement de l’âge de retraite et de réduction des inégalités. La raison principale est qu’un grand nombre de travailleurs vont bénéficier du bonus sans pour autant travailler davantage, et/ou vont même partir plus tôt en retraite.
 Afin de relever le taux d’emploi des travailleurs âgés, le gouvernement belge a approuvé fin 2005 une loi baptisée «Pacte de Solidarité entre Générations». Parmi les mesures mises en œuvre, le «bonus de pensio » consiste en une augmentation forfaitaire et permanente du montant de la pension légale pour les travailleurs salariés qui décident de reporter leur départ à la retraite. Le bonus a finalement été fixé à 624€ pour toute année d’activité professionnelle au-delà de 62 ans (ou au-delà d’une 44e année de carrière). Lors des négociations précédant le Pacte de Solidarité, il était question de fixer le montant du bonus à 300€ pour toute année de travail au-delà de 60 ans. C’est ce scénario initial que Marjan Maes a analysé dans son étude. Plutôt que de pénaliser la retraite anticipée, le gouvernement a donc choisi de récompenser les années de travail supplémentaires.
 L’objectif de l’étude de Marjan Maes est d’évaluer les effets du «bonus de pension» sur l’âge de départ à la retraite, sur le budget des pensions et sur les inégalités au sein de la population âgée. Son second objectif est de comparer cette mesure à deux autres politiques non retenues par le gouvernement et visant à pénaliser les départs anticipés en retraite. Un premier scénario alternatif, qualifié de «malus proportionnel», consiste à pénaliser (respectivement, augmenter) la pension légale de 5 % par année de retraite anticipée avant 65 ans (respectivement, reportée après 65 ans) dans l’intervalle 60-70 ans. Les pénalisations ou gratifications sont donc proportionnelles au niveau de la pension légale. En d’autres termes, la pension prise à l’âge de 60 (respectivement 70) ans est 25 % plus basse (respectivement élevée) que si elle avait été prise à l’âge légal de 65 ans. Le second scénario alternatif, qualifié de «malus forfaitaire», consiste à ajuster la pension légale d’un montant forfaitaire pour chaque année d’écart entre l’âge de départ en retraite et 65 ans. Les pénalisations ou gratifications sont indépendantes du revenu. Elles pénalisent donc davantage les individus à bas revenu que les individus à revenu élevé. Afin de rendre ce scénario comparable avec le précédent, les montants forfaitaires ont été choisis de manière à induire le même impact budgétaire pour le gouvernement : on les calcule, pour chaque âge de retraite possible, comme la différence moyenne entre les prestations de pension en l’absence de réforme et sous le malus proportionnel.
 Les résultats de Marjan Maes sont révélateurs. Le «bonus de pension» n’augmente l’âge de départ à la retraite que de 0,3 année alors que des réformes de type «malus» augmentent l’âge de départ à la retraite de 1,1 années. Par ailleurs, alors que cette mesure a été adoptée pour améliorer la soutenabilité budgétaire du régime des pensions, le «bonus de pension» a pour conséquence de creuser le budget des pensions. Les recettes fiscales supplémentaires générées par un bonus (sous forme de cotisations de sécurité sociale accrues et grâce à des périodes de retraite plus courtes) sont inférieures au montant global de bonus de pension à verser aux pensionnés pendant toute la période de leur retraite. Au contraire, les politiques de malus génèrent les effets budgétaires escomptés.
 Quelle est l’intuition de ces résultats ? Les trois réformes génèrent des incitants à reporter le départ à la retraite pour un grand nombre de travailleurs âgés. Cependant, un autre effet financier est à l’œuvre qui, dans le cas du bonus, pousse les travailleurs à partir plus tôt. En effet, sans bonus, il était optimal pour certains individus de travailler au-delà de 60 ans. Comme il est impossible de discriminer entre ces individus et ceux choisissant de se retirer anticipativement, ces individus reçoivent un cadeau inespéré. L’introduction du bonus augmente le montant attendu de leur pension légale et crée un «effet de richesse» qui les pousse à consommer à se retirer plus tôt du marché du travail. En résumé, bien qu'un bonus par année de travail additionnelle incite à travailler plus longtemps, cet effet est contrebalancé par un effet-richesse qui, lui, avance l'âge de la retraite. Cet effet de richesse est important et avéré : il explique pourquoi l’introduction d’un bonus dans le régime des fonctionnaires publics en 2001 n’a pas généré la moindre augmentation de l’âge de la retraite, mais a creusé le déficit du gouvernement. A contrario, les réformes visant à pénaliser les retraites anticipées induisent un effet de richesse négatif qui contribue à retarder les départs à la pension. Par conséquent, les effets du bonus de pension sur l’âge de départ à la retraite et sur le budget sont moins favorables que ceux des pénalisations ou malus.
 Comme le bonus consiste en un montant forfaitaire, le gouvernement a également mis en avant les effets redistributifs potentiels de sa politique. Pourtant, en matière d’inégalités, le bonus de pension contribue à augmenter les écarts de revenus entre les bénéficiaires d’une pension légale et les bénéficiaires de la GRAPA (Garantie de Revenu Aux Personnes Agées), étant donné que la GRAPA, en tant que système d’assistance, n’est pas affectée par les réformes de pension. Les résultats de Marjan Maes démontrent que ce sont les réformes pénalisant la retraite anticipée qui réduisent le plus les inégalités des revenus parmi les pensionnés.
- Research Article
- 10.4000/12qyd
- Jan 1, 2024
- Tabularia
Le tabellionage peut-il nous permettre d’approcher l’organisation économique et sociale d’une industrie, comme la draperie médiévale ? La draperie rouennaise nous servira de modèle. Les premiers registres de Rouen, à partir de 1360, ont conservé les actes concernant les affaires commerciales, mais l’on ne sait pas toujours la personne qui se cache sous le nom, et le nom lui-même est rarement accompagné de la profession. Et, à partir de 1415-1419, les affaires commerciales, ce que l’on appelle le « meuble », disparaissent. L’enquêteur doit donc travailler dans une fenêtre du temps et rechercher la profession dans les réglementations des métiers. Trois séries d’actes ont permis d’accéder au déroulement de la production : l’achat de laine, les frais de teinture et la location d’installations à tendre le drap avant la vente, les pentheurs, en début et fin du processus. Selon le modèle florentin, la draperie médiévale était censée être dominée par le marchand-drapier, qui achetait la laine, la faisait travailler et vendait le drap, mais il n’était pas certain que ce modèle fonctionne au nord des Alpes. C’est cette dernière thèse que l’enquête a voulu confirmer, en décrivant un monde de la petite entreprise, qui ne laissait guère de place au grand marchand capitaliste. L’enquête a aussi révélé l’importance des réseaux financiers et des réseaux familiaux, le rôle de l’entraide et celui d’une culture de la confiance. À côté du marchand-entrepreneur, il a existé aussi de petits artisans entrepreneurs.
- Research Article
- 10.54563/mosaique.2763
- Jun 30, 2025
- Mosaïque
Au iie siècle de notre ère, Philon de Byblos manipule un certain nombre de courants de pensée et d’outils qui lui permettent de (re)construire une Histoire Phénicienne, de façon à se démarquer culturellement au sein de l’Empire romain. Dans les fragments qui nous sont parvenus, il reproche aux Grecs le caractère bâtard de leur récit – νόθος τῆς ἀφηγήσεως – des origines de l’humanité et de la culture. C’est leur goût pour l’allégorie, la mise en scène et la déformation de ce qu’il considère comme la vérité que l’auteur pointe du doigt. La faute de goût des Grecs découle pour lui de leur ignorance, de leur goût pour la querelle et surtout de leur discordance. À première vue, la transgression culturelle est double, puisqu’en dénonçant celle des Grecs, Philon critique vivement l’hellénisme dans un Empire de culture grecque, gouverné par un pouvoir philhellène. En réalité, cette provocation culturelle est volontaire : elle sert l’écriture d’une middle ground story, où Philon « bricole » une identité culturelle phénicienne. Ce faisant, il fait non seulement bénéficier la Phénicie d’un prestige renouvelé, mais il participe aussi à la politique impériale qui cherche à stimuler les identités locales en province pour faciliter leur processus d’intégration à l’Empire.
- Single Book
- 10.46455/helbing_lichtenhahn/978-3-7190-4837-2
- Oct 16, 2024
Les sanctions pénales ne résultent pas d’un choix étatique purement abstrait. En effet, que ce soit lors de leur catégorisation (en tant que peines ou mesures), de l’importance allouée à chacune d’entre elles ou de leurs fonctions et finalités, le législateur s’inspire des « solutions » adoptées par d’autres ordres juridiques. La présente étude aborde, du point de vue historique, les diverses sanctions pénales applicables aux adultes et aux mineurs en droits suisse et équatorien. Elle compare, par la suite, les sanctions appliquées de nos jours par les deux régimes juridiques susdits. Des renvois aux textes supranationaux ainsi qu’à la législation d’autres États sont également faits lorsque cela s’avère pertinent.
- Research Article
1
- 10.54648/erpl2024027
- Jul 1, 2024
- European Review of Private Law
Abstract: ‘Lost in information. The transparency dogma of the Unfair Contract Terms Directive’ explores the transparency principle as developed by the Court of Justice of the European Union based on the Directive on Unfair Contract Terms in Consumer Contracts (further:: UCTD). The EU consumer acquis is based on two assumptions: that of informational imbalance and the negotiating power imbalance between consumers and traders as a group. While the UCTD was enacted as a tool to address the lack of bargaining power, according to the ECJ’s case law it establishes a system of protection that covers both these deficiencies experienced by consumers. This approach reinforces the meaning of informational duties under the UCTD and shifts the balance from protecting through content control under the UCTD more towards protecting through information. This contribution critically scrutinises the transparency requirements construed by the ECJ within the UCTD’s legislative framework. It begins with a brief presentation of the UCTD’s provisions that deal with transparency requirements, their aims, construction and the consequences of a violation. Next, it looks at the unified approach of the ECJ towards transparency and discusses various contexts in which the ECJ interprets transparency: with the aim of providing information to consumers, which includes transparency requirements for specific contractual relations, transparency requirements as a part of the unfairness test, and transparency requirements as a threshold for controlling unfairness of the most important terms under the contract. It ends with a short overview of the concept of the average consumer developed by the ECJ through transparency and its potentially paradoxical consequences.Résumé: ‘Lost in information. Le dogme de la transparence de la directive sur les clauses contractuelles abusives’ développe le principe de transparence tel qu’il a été élaboré par la Cour de justice de l’Union européenne sur la base de la directive sur les clauses contractuelles abusives. L’acquis communautaire en matière de la protection des consommateurs repose sur deux hypothèses, à savoir, d’une part, le déséquilibre en matière d’information et, d’autre part, le déséquilibre du pouvoir de négociation entre les consommateurs et les professionnels en tant qu’un groupe d’acteurs. Si la directive sur les clauses contractuelles abusives a été adoptée pour remédier au manque de pouvoir de négociation, il n’en demeure pas moins que, conformément à la jurisprudence de la CJUE, cette directive établit un système de protection qui tient compte des deux dites vulnérabilités des consommateurs. Cette approche renforce la portée des obligations d’information prévues par ladite directive et fait pencher la balance entre la protection par le contrôle du contenu des clauses et la protection par l’information en faveur de cette dernière protection. La présente contribution examine de manière critique les exigences de transparence interprétées par la CJUE dans le cadre législatif de la directive sur les clauses abusives. Elle commence par une brève présentation des dispositions de cette directive qui portent sur les exigences de transparence, de leur objectif, de leur construction et des conséquences d’une violation de ces dispositions. Ensuite, l’approche unifiée de la CJUE à l’égard de la transparence est présentée, ensemble avec les différents contextes dans lesquels cette Cour interprète la transparence, dans le but de fournir des informations aux consommateurs, ce qui tient compte des exigences de transparence pour des rapports contractuels spécifiques, l’exigence de transparence en tant qu’élément du test de caractère abusif des clauses contractuelles, et les exigences de transparence en tant que seuil pour contrôler le caractère abusive des clauses les plus importantes d’un contrat. La présente contribution se termine par un bref aperçu du concept de consommateur moyen développé par la CJUE à travers la transparence et ses conséquences potentiellement paradoxales.Zusammenfassung: ‘Lost in information. Das Transparenzdogma der Richtlinie über missbräuchliche Vertragsklauseln’ befasst sich mit dem Transparenzprinzip, das der Gerichtshof der Europäischen Union auf der Grundlage der Richtlinie über missbräuchliche Vertragsklauseln entwickelt hat. Der EU-Besitzstand im Bereich des Verbraucherschutzes basiert auf zwei Annahmen: dem Informations- und dem Verhandlungsmachtungleichgewicht zwischen Verbrauchern und Gewerbetreibenden als Gruppe. Während die Richtlinie über missbräuchliche Vertragsklauseln als Instrument zur Behebung des Mangels an Verhandlungsmacht erlassen wurde, führt sie nach der Rechtsprechung des EuGH ein Schutzsystem ein, das beide Defizite der Verbraucher aufgreift. Ein solcher Ansatz stärkt die Bedeutung der Informationspflichten im Rahmen des UCTD und verschiebt das Gleichgewicht zwischen dem Schutz durch Inhaltskontrolle und durch Information im Rahmen des UCTD zugunsten des letzteren. In diesem Beitrag wird die Auslegung der Transparenzanforderungen durch den EuGH innerhalb des UCTDRechtsrahmens kritisch hinterfragt. Er beginnt mit einer kurzen Darstellung der UCTDBestimmungen, die sich mit den Transparenzanforderungen, ihrem Ziel, ihrer Konstruktion und den Folgen von Verstößen befassen. Anschließend wird der einheitliche Ansatz des EuGH in Bezug auf die Transparenz erläutert und es werden verschiedene Kontexte erörtert, in denen der EuGH die Transparenz auslegt: mit dem Ziel, den Verbrauchern Informationen zur Verfügung zu stellen, was Transparenzanforderungen für bestimmte Vertragsbeziehungen, Transparenzanforderungen als Teil der Missbräuchlichkeitsprüfung und Transparenzanforderungen als Schwellenwert für die Kontrolle der Missbräuchlichkeit der wichtigsten Vertragsklauseln einschließt. Der Beitrag endet mit einem kurzen Überblick über das vom EuGH entwickelte Konzept des Durchschnittsverbrauchers durch Transparenz und seine potenziell paradoxen Folgen.Resumen: ‘Lost in information. El dogma de transparencia de la Directiva sobre cláusulas contractuales abusivas’ elabora el principio de transparencia desarrollado por el Tribunal de Justicia de la Unión Europea en relación con la Directiva sobre cláusulas contractuales abusivas. El acervo de la UE en materia de consumo se fundamenta en dos presupuestos: el desequilibrio informativo y el desequilibrio en el poder de negociación entre los consumidores y los empresarios como grupo. Si bien la Directiva sobre cláusulas contractuales abusivas se promulgó como instrumento para hacer frente a la falta de poder de negociación, la jurisprudencia del TJUE establece un sistema de protección que recoge ambas deficiencias experimentadas por los consumidores. Este enfoque refuerza el significado de las obligaciones de información de la directiva y desplaza el equilibrio entre la protección a través del control del contenido y a través de la información hacia esta última. Esta contribución analiza críticamente los requisitos de transparencia interpretados por el TJUE en el marco de la directiva. Comienza con una breve presentación de las disposiciones de la directive que tratan de los requisitos de transparencia, su objetivo, construcción y consecuencias de la violación. A continuación, se desarrolla el enfoque unificado del TJUE hacia la transparencia y se analizan diversos contextos en los que el TJUE interpreta la transparencia: con el objetivo de proporcionar información a los consumidores, lo que incluye requisitos de transparencia para relaciones contractuales específicas, requisito de transparencia como parte del control de abusividad y requisitos de transparencia como umbral para controlar el carácter abusivo de los elementos esenciales del contrato. El artículo concluye con una breve descripción del concepto de consumidormedio desarrollado por el TJUE a través de la transparencia y sus consecuencias potencialmente paradójicas.
- Research Article
- 10.3406/austr.2011.4931
- Jan 1, 2011
- Austriaca
Le thème de la crise était un motif commun à la philosophie et à la critique de la culture (Kulturkritik) de la période de l’entre-deux-guerres. Le livre très influent d’Oswald Spengler, Le Déclin de l'Occident, publié en 1918, prédisait l’effondrement de la civilisation occidentale comme élément d’un cycle du développement historique, tandis que les conférences sur la crise dans les sciences humaines prononcées par Edmund Husserl à la fin des années 1930 évoquaient l’image d’une modernité aliénée, séparée du monde de la vie (Lebenswelt). Cet article étudie le cas de deux autres auteurs qui développèrent une pensée de la crise : Josef Strzygowski et Hans Sedlmayr. Le livre de Strzygowski, La Crise des sciences humaines, paru en 1923, met en avant le modèle d’un nouveau genre d’histoire de l’art qui surmonterait ce qu’il envisageait comme la crise des sciences humaines traditionnelles, tandis que de son côté Sedlmayr publiait en 1951 La Perte du centre, une critique de la fragmentation et de l’aliénation de l’art et de la culture modernes. Ces travaux ont habituellement été écartés d’emblée comme produits d’une pensée profondément régressive, et si cet article ne cherche pas à défendre leurs aspects problématiques, il souligne la nécessité de lire attentivement chacun de ces deux textes. Il soutient l’idée que Strzygowski en particulier, ne doit pas être vu tellement comme un conservateur résolument antimoderne, mais plutôt comme la voix d’un modernisme réactionnaire cherchant à articuler une vision alternative de ce que l’art et la culture modernes pourraient être. Une telle analyse nécessite par conséquent une nouvelle appréciation du paysage de l’école viennoise et de la place de la modernité au sein de ce dernier.
- Research Article
- 10.24114/hxg.v12i1.41931
- Jul 10, 2023
- HEXAGONE Jurnal Pendidikan, Linguistik, Budaya dan Sastra Perancis
RésuméEn tant que poète symbolique, Rimbaud utilise le langage figuratif et les symboles pour éveiller l'imagination dans sa poésie. Il est présent dans le poème Voyelles (1871). Il existe diverses études antérieures qui examinent le poème. Le large champ d'interprétation du sens dans le poème est l'une des raisons. Pour poursuivre la discussion scientifique liée à la poésie de Voyelles, cette recherche propose une nouveauté au sujet de la construction de l'utopie. Le but de cette étude est d'expliquer comment l'utopie se construit dans le poème et de décrire l'utopie qui se construit dans le poème. La méthode utilisée dans cette étude est une méthode qualitative avec une approche structuralo-sémiotique. Cette étude a révélé que le poème transmet le désir d'un état idéal difficile à atteindre. Le pessimisme et la complexité se retrouvent également dans la formation de l'utopie dans le poème. L'utopie dans le poème est représentée par la couleur blanche et est construite à travers la symbolisation de la couleur spectrale primaire en tant qu'élément formant. Le poème met l'accent sur le rôle de l'équilibre et de l'harmonie entre les humains, la nature, la science et la transformation dans la formation de l'utopie. L'utopie présente dans le poème est décrite comme la fin des différents problèmes vécus par la société française au XIXe siècle.Mots clés: Symbolisme, Rimbaldien, Couleur, Utopie, Sémiotique
- Research Article
- 10.14428/regardseco2004.02.01
- Oct 12, 2018
- Regards économiques
Les autorités régionales belges doivent, ces jours-ci, se prononcer sur les différentes options de réforme de la Politique Agricole Commune (PAC) proposées par l'accord européen de juin dernier. Ce numéro spécial de Regards Economiques se penche sur les effets et les enjeux de cette réforme. Plusieurs questions sont abordées. En quoi consiste cette réforme ? Quelles sont ses implications pour l’agriculture belge ? Faut-il maintenir des aides aux agriculteurs ? A qui profite la PAC actuelle ? Comment rendre la PAC plus juste et plus efficace ?
 En quoi consiste la nouvelle réforme de la PAC ?
 En juin dernier, l'Union européenne a décidé de réformer une nouvelle fois le mode de soutien en faveur du secteur agricole. Cette réforme consiste à convertir la plupart des aides actuelles en un seul paiement unique qui sera distribué aux agriculteurs en fonction de l'étendue de leur superficie agricole cultivée, indépendamment du type de culture ou d'élevage qu'ils pratiquent et du volume de production qu'ils mettent sur le marché. C'est le "découplage"complet des aides agricoles vis-à-vis de l'acte de production, un principe de subvention agricole longuement recommandé par les économistes agricoles dont s'est enfin inspirée la Commission européenne en dépit des résistances conservatrices de nombreux Etats membres. C'est donc l'abandon d'un système de soutien inefficace qui, jusqu'à la réforme précédente de 1992, était essentiellement basé sur un système de prix agricoles garantis largement supérieurs aux prix mondiaux, de barrières douanières impénétrables et de subventions aux exportations exorbitantes. Non seulement ce système fut incapable de soutenir le revenu agricole et de diminuer la disparité des revenus entre exploitations et régions, mais il fut responsable d'excédents agricoles colossaux, de dépenses considérables, de pollutions agricoles et de tensions commerciales avec les pays les plus compétitifs. La nouvelle réforme permettra de mieux orienter les choix de production vers les réelles opportunités du marché et de réduire les distorsions des subventions agricoles sur les marchés agricoles tant européens qu'internationaux. En plus du découplage, deux autres principes sont parallèlement mis en oeuvre. Le principe de l'éco-conditionnalité liera à terme la perception du paiement unique au respect de 18 exigences réglementaires dans le domaine de l'environnement, de la sécurité des aliments, de la santé animale et phytosanitaire et du bien-être animal. Le principe de la modulation instaurera une légère discrimination en faveur des petites exploitations en les exemptant d'une baisse prévue de 5 % du paiement unique. Les économies budgétaires réalisées par cette mesure permettront de renforcer le financement des mesures dites de développement rural.
 L'accord de juin 2003 offre toutefois la possibilité aux Etats membres de maintenir une proportion de paiements directs couplée à la production s'ils craignent la perturbation de marchés agricoles ou l'abandon de certaines productions tout en intégrant la proportion restante des paiements directs dans le paiement unique. Diverses options de découplage partiel leur sont proposées. Les autorités régionales du pays doivent incessamment se prononcer sur ces options.
 Quelles sont ses implications pour l’économie belge ?
 A l’aide de deux modèles économiques de simulation, nous avons tenté d’évaluer les conséquences possibles sur l’agriculture belge des différentes options de découplage des aides telles qu’autorisées par l’accord de juin dernier.
 Les simulations montrent des substitutions importantes entre les productions agricoles végétales au profit de cultures moins intensives telles que les prairies temporaires, une baisse de la production de viande bovine mais le maintien de la production de lait. Malgré ces ajustements, notamment dans le domaine de l'élevage, les simulations indiquent le maintien et même une légère hausse des revenus nets agricoles dépendant de l'effet des variations de l'offre sur le prix du marché. Ces ajustements ainsi que les hausses du revenu agricole sont de façon générale les plus prononcés pour l'option de découplage complet de toutes les aides. C'est en effet cette option qui procure la plus grande cohérence entre l’allocation des ressources fixes de la région et les opportunités de marché. Une analyse plus fine au niveau des différents types d'exploitation montre toutefois que l'option de découplage complet à l'exception des aides pour le troupeau de vaches allaitantes et l'abatage de bovins est la plus favorable pour les exploitations spécialisées dans ce type d'activités alors que cette option est presque autant favorable pour les autres types d'exploitation que celle du découplage complet. Dans la mesure où, en outre, le contribuable qui finance les aides directes, apprécie le maintien d'un troupeau allaitant à des fins, par exemple, d'aménités paysagères, ou d'une profession d'éleveurs là où elle est la plus concentrée et menacée, c'est-à-dire dans le sud de la Belgique, il semble que l'option de découplage complet de toutes les aides à l'exception de celles réservées à l'élevage allaitant se révèle comme la plus adéquate à la structure du secteur agricole belge parmi toutes les autres options autorisées par l'accord agricole européen de juin dernier.
 Les résultats de ces simulations ne prennent toutefois pas en compte plusieurs autres défis à l'agriculture belge. Il s'agit notamment (1) du renchérissement possible des terres agricoles en raison de la seule nécessité de mettre en culture de telles terres pour obtenir des subsides importants, (2) de l'évolution des prix agricoles et de leur volatilité sur le marché européen et (3) de la justification à plus long terme des aides importantes consacrées au secteur agricole.
 Faut-il maintenir des aides aux agriculteurs ? A qui profite la PAC actuelle ?
 Pour mettre en perspective les anticipations exposées plus haut et juger si la PAC a bien l’utilité qu’elle devrait avoir, il vaut la peine de se demander ce qui justifie, sur le plan des principes, de subsidier le secteur agricole. Il faut d’abord remarquer que les politiques agricoles des pays du Nord, Europe et USA en tête, ont nuit à la prospérité des agriculteurs du Sud, notamment en leur coupant l’accès aux marchés prospères du Nord. Elles n’ont pas pu soutenir le revenu agricole en Europe et sont responsables de tensions commerciales avec le reste du monde et de dépenses monstrueuses ! Même parmi les producteurs européens de biens agricoles, la PAC ne profite vraiment pas aux petites exploitations, dont la production et la superficie sont faibles : elles n’ont reçu et ne recevront que de faibles subsides. Or, la demande d’intrants agricoles (machines, terre, engrais,…) et leurs prix sont globalement plus élevés qu’ils ne le seraient sans subside. La petite exploitation agricole peut en fait se retrouver avec un revenu identique ou inférieur à celui qu’elle aurait si le subside n’existait pas. L’équité ne fournit donc pas de justification à l’existence de subsides agricoles.
 Néanmoins, l’activité agricole ne se limite pas seulement à la production des biens agricoles : la sécurité alimentaire, la qualité de l’environnement et l’entretien des zones rurales sont trois exemples d’aménités qui résultent des activités agricoles. Or, sans régulation, les aménités sont en général offertes en quantités inférieures à ce qui est socialement souhaitable. Il faut donc un subside à l’activité agricole pour atteindre un niveau efficace d’aménités. L’éco-conditionnalité n’est qu’un pas timide en ce sens. On peut déplorer que les modes passés et présents de soutien agricole en Europe ne contribuent pas à la production efficace d’aménités rurales. Au contraire, l’analyse ne nous permet d’identifier, par élimination, que deux types de bénéficiaires effectifs de la PAC, dans n’importe laquelle de ses versions : les grandes exploitations agricoles etles fournisseurs d’intrants agricoles, en particulier les propriétaires fonciers.
 Comment rendre la PAC plus juste et plus efficace ?
 Les contribuables ne souhaitent probablement pas que leurs impôts alimentent la valeur foncière des terres agricoles ou la prospérité des plus grandes exploitations agricoles. Nombre d’agriculteurs, particulièrement ceux que le système actuel laisse en bordure de la pauvreté, pourraient aussi trouver un plus grand intérêt à une réforme, non pas à une libéralisation pure et simple, mais à une réorientation des interventions publiques vers la rétribution des aménités typiques des activités rurales. Une conclusion assez claire émerge donc de la mise en perspective normative des effets du "découplage" qui constitue la réforme de la PAC. Pour des raisons d'équité et d'efficacité, le re-couplage du paiement unique à des fins spécifiques valorisées par le contribuable ou le consommateur qui le finance, est effectivement la seule alternative permettant de justifier à plus long terme des budgets importants réservés au secteur agricole vis-à-vis, notamment, de critiques de plus en plus acerbes à l'égard de tels budgets qu'a bien mises en évidence le rapport Sapir. Cette réorientation est une nécessité qui s'imposera dans l'avenir au fur et à mesure que la justification du paiement unique comme aide aux ajustements structurels perdra sa pertinence.
- Single Report
- 10.70010/nkup8051
- Sep 26, 2024
Contexte Ce rapport a pour objectif de présenter les résultats d’une recherche-action visant le développement d’un modèle d’intervention préventive en santé et sécurité du travail (SST) par et pour les préposés aux bénéficiaires (PAB) dans les centres d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD) du Québec. Les PAB sont au cœur des soins prodigués dans les milieux gériatriques. Malheureusement, l’augmentation du nombre de blessures et l’accentuation des problématiques de santé psychologique subies par ce personnel depuis quelques années fragilisent leur situation, ce qui se prouve en termes de faible rétention et de fort absentéisme chronique de ce personnel. Ce projet, qui est issu au départ d’une demande du milieu, visait à implanter une démarche d’intervention dans trois CHSLD du Québec, en nous inspirant d’autres études menées dans d’autres types d’organisation, comme les centres jeunesse. Revue de littérature La littérature scientifique nous enseigne que la participation des travailleurs au développement et à l’implantation de programme de prévention de la SST est une condition clé de leur succès, et ce préférablement à une intervention unilatéralement « classique » davantage axée uniquement sur la formation du personnel. Néanmoins, les CHSLD ne sont pas reconnus comme des milieux innovants, dans lesquels les PAB peuvent participer activement au développement des programmes de formation qui les concerne. La participation des PAB à une intervention préventive en SST, même si elle leur est destinée, apparaît comme un défi particulièrement important et difficile à relever. Objectifs L’objectif principal de cette recherche-action consistait à développer des modalités d’interventions préventives innovantes en matière de SST portées principalement par les PAB en CHSLD, afin d’en tirer des connaissances généralisables à d’autres milieux. Nos objectifs spécifiques visaient à : 1) cerner, dans les CHSLD, les facteurs de risque ainsi que les facteurs de protection présents ; 2) documenter et évaluer un processus mené « pour et par des PAB » qui vise à réduire les contraintes ciblées dans chaque milieu ; 3) documenter et évaluer le processus d’implantation de ces mesures ainsi que la participation des PAB dans la mise en place de la démarche ; 4) documenter les effets attendus des interventions proposées au sein des groupes de soutien à l’intervention (GSI) ; 5) dresser un inventaire des conditions (dimensions contextuelles et organisationnelles) favorables ou défavorables à l’implantation d’une intervention préventive misant sur la participation des préposés aux bénéficiaires. Cadre d’intervention L’étude a pris la forme d’une recherche-action. Selon cette approche, c’est principalement par l’action que l’on peut générer des connaissances scientifiques pour comprendre et changer la réalité sociale des individus et des systèmes, donc d’organisations telles que les CHSLD. Dans cette perspective, la théorie découle donc de l’action. Dans le cadre d’une recherche-action, on vise notamment à garantir que l’objet réponde à la fois aux problèmes pratiques des membres de l’organisation ainsi qu’aux préoccupations théoriques de recherche. Aussi, nous nous sommes appuyé sur le cadre proposé par Goldenhar et al., (2001) pour élaborer la démarche d’intervention. Il s’agit d’un modèle en 3 phases : le développement (l’identification a priori des risques ciblant des priorités sur lesquelles agir), l’implantation (l’implantation d’une intervention cohérente avec ces cibles via un GSI) et l’évaluation de l’intervention (l’étude de l’efficacité de l’intervention). Méthodologie Notre processus méthodologique a suivi le cadre d’intervention précité, soit trois phases de recherche-action : le diagnostic (phase I), l’intervention (phase II) et l’évaluation (phase III), et ce, dans trois CHSLD différents. Mentionnons que nous avons rajouté une phase d’entrevues, à la suite de la pandémie de la COVID-19 (phase I-B). Nous avons réalisé un total de 50 entrevues, soit 36 lors de la phase I (trois sites) et 21 en phase I-B. Nous avons réalisé également des heures d’intervention dans le cadre de la phase II, afin de développer les GSI. Lors des phases II et III, 15 informateurs clés ont été rencontrés sur une base individuelle et volontaire, et ce dans les deux CHSLD où ont été implantés des GSI. Notons que la pandémie a considérablement freiné notre projet et limité la portée de notre action. Il a été décidé, à la suite de la phase I-B, qu’un CHSLD serait supprimé de notre projet, tant les enjeux de recrutement pour les entrevues (phase I-B) et GSI (phase II) semblaient complexes. Résultats Les résultats de la phase I et I-B mettent de l’avant, dans les trois milieux, des facteurs de risque et des facteurs de protection relatifs à la charge de travail, au manque de soutien des collègues ou des supérieurs, à la faible reconnaissance et à la faible autonomie décisionnelle. Ce diagnostic a permis de préciser certaines pistes d’action pour les deux CHSLD participant à la phase II. Nous présentons ces pistes, de même que le processus complexe par lequel nous avons pu (ou non) développer des innovations organisationnelles dans les milieux. Dans le CHSLD du Hameau, quatre mesures ont été retenues (p. ex. : procéder à un exercice de clarification des rôles, des tâches partagées). Au CHSLD du Parvis, quatre mesures ont été aussi retenues (p. ex. élaborer un plan de contingence sur les unités). En guise d’évaluation, nous présentons plusieurs conditions gagnantes et défis identifiés par les acteurs des milieux interrogés. Discussion Notre projet a permis de documenter la complexité de développer des projets participatifs en CHSLD, notamment lorsqu’ils visent les PAB. Un premier facteur de complexité porte sur la structure hiérarchique même de l’organisation, qui donne peu de place et de pouvoir aux PAB, alors même que cette catégorie d’emploi est centrale en CHSLD. Un second facteur a trait à la fragilité importante de ces processus d’innovations lorsque des contraintes extérieures entravent ou bouleversent les pratiques quotidiennes. Certaines contraintes peuvent être importantes et de courte durée (comme la pandémie de la COVID-19), mais d’autres sont relativement récurrentes et fragilisent tout autant le même processus (manque de main-d’œuvre ponctuelle, épidémie d’influenza, visites de qualité, etc.). Des facteurs de soutien sont identifiés, comme l’engagement structuré de l’ensemble de l’organisation envers le projet (des hautes directions comme SAPA aux gestionnaires immédiats), la composition rigoureuse du comité chargé de développer et d’implanter les mesures proposées et le développement d’une perspective de pérennisation à moyen et long terme.
- Research Article
- 10.7202/1117957ar
- Jan 1, 2025
- Circuit
- Research Article
- 10.7202/1117958ar
- Jan 1, 2025
- Circuit
- Research Article
- 10.7202/1117962ar
- Jan 1, 2025
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- Research Article
- 10.7202/1117965ar
- Jan 1, 2025
- Circuit
- Research Article
- 10.7202/1117960ar
- Jan 1, 2025
- Circuit
- Research Article
- 10.7202/1117959ar
- Jan 1, 2025
- Circuit
- Research Article
- 10.7202/1117963ar
- Jan 1, 2025
- Circuit
- Research Article
- 10.7202/1117961ar
- Jan 1, 2025
- Circuit
- Research Article
- 10.7202/1117964ar
- Jan 1, 2025
- Circuit
- Research Article
- 10.7202/1116278ar
- Jan 1, 2024
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