« Ce qui seul mérite le nom de style » : Adorno, Beethoven et les bassons de la Cinquième Symphonie

Abstract

Résumé À la fin de la Cinquième Symphonie de Beethoven, on entend un timbre étrange : un solo de bassons, fortissimo, dans le registre aigu, un effet si incongru qu’on croirait à une faute d’orchestration. Adorno voit là au contraire « ce qui seul mérite le nom de style ». C’est que ce défaut du timbre est révélateur d’un défaut de la dialectique formelle, point crucial qu’Adorno scrute tout au long de son essai sur Beethoven. Il s’agit donc de redéployer cette lecture immanente de la partition, et de replacer le motif « raté » des bassons à l’endroit problématique de la forme beethovénienne (sa réexposition). Il s’agit aussi de retracer comment ce fragment participe d’une réflexion plus ample, de la Dialectique de la raison jusqu’à la Théorie esthétique. Ce double mouvement, musical et théorique, permet de mettre au jour l’originalité d’une théorie critique du style : le style non plus perçu comme un travail sur la langue, mais comme un correctif objectif de la langue sur les formes.